La fidélité

« Bravo, félicitations pour une personne qui a toujours continué sur sa voie malgré les modes. Bravo ». Voilà une appréciation relevée sur les réseaux la semaine dernière ; elle me touche particulièrement.

Effectivement, je suis resté – et reste fidèle – à la discipline que je pratique, démontre et enseigne depuis des décennies. Fidèle au ju-jistu et à tout ce qui l’entoure.

Je n’ai aucune envie de retourner ma veste (de judogi) ni mon pantalon, comme dans la chanson « l’opportuniste » de Jacques Dutronc. Ni d’ailleurs d’abandonner cette tenue. Le respect commence par celui que l’on doit à sa discipline.

Je reste fidèle à mes convictions (c’est n’est pas donné à tout le monde d’en avoir), je n’ai aucune raison de renier une discipline aussi complète techniquement et porteuse (quand elle n’est pas dénaturée) de précieuses valeurs. Elle a traversé les siècles et donné tant de satisfactions à tant de monde et elle continue d’en donner.

Certes, ce n’est pas d’elle dont on parle le plus depuis quelque temps. Mais ce n’est pas une raison (bien au contraire) pour faire la girouette en cédant aux sirènes de la mode.

Il ne s’agit pas d’un manque d’ouverture d’esprit. En tant que professionnel, en plus du ju-jitsu et du judo, j’ai pratiqué le karaté, l’aïkido, la boxe française et ce qu’on appelait à l’époque la boxe américaine. On va me dire que ce sont des disciplines anciennes, qu’elles sont ringardes et dépassées. Que le kimono est à ranger au vestiaire des antiquités. Évidemment je n’adhère pas à ces points de vue, mais chacun fait ce qui lui plaît. De toutes les façons, nous avons tous deux bras et deux jambes et sur le plan purement efficace ce n’est pas l’effet de mode qui changera quoi que ce soit, mais la composition technique de l’art, la qualité technique et pédagogique de l’enseignant et évidemment le potentiel de l’élève. Un élève qui s’impose une régularité dans les entraînements, comme je l’évoquais dans l’article de la semaine dernière.

Et puis, et surtout, ces disciplines sont porteuses de valeurs que nous ferions bien de ne pas négliger.

Maintenant, une anecdote qui n’avait pas manqué de m’étonner, avec la confession d’un de mes ancien élève devenu enseignant, m’avouant qu’il appliquait ma méthode, mais sous un autre nom, celui d’une discipline « plus à la mode ». On ne peut pas garantir la santé morale de tous nos anciens élèves !

D’autre part, je ne manque en aucun cas de respect envers les nouvelles pratiques – il faut que mille fleurs s’épanouissent – pour peu qu’elles remplissent un rôle éducatif.

Pour qu’un art martial s’inscrive dans la durée, ce qui n’est pas loin d’être un pléonasme, plusieurs conditions doivent être réunies, au moins trois, je les appelle les 3 E : Efficacité, Éducation et Épanouissement. A (re) développer prochainement.

Enfin, quand vous êtes en parfaite harmonie avec l’art que vous pratiquez, pourquoi changer ? Cette fidélité et cette absence de compromission m’ont souvent coûté, mais on ne se refait pas.

Photo d’illustration : Bercy 1995 avec un kani basami

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C’est compliqué de faire simple

Cette contradiction n’en est pas vraiment une. Mon professeur (qui était aussi mon père) me répétait souvent : « divise par deux l’intensité technique de ce que tu prévois d’enseigner et ça risque encore d’être dix fois trop difficile ».

Certes, il s’agit d’une formule, elle vaut ce que valent les formules ; elles sont là pour forcer le trait. Il n’empêche que la première qualité d’un enseignant est de se mettre au niveau de ses élèves et que cette évidence n’est pas toujours la règle.

Parfois il y l’envie de « montrer trop » sans que les étudiants aient le temps de digérer, ou le besoin de montrer « trop difficile » sans que l’élève possèdent les outils indispensables à l’assimilation ; ou encore les deux. Avant d’apprendre à plonger, il faut savoir nager.

Faire simple dans le contenu et dans l’expression. L’essentiel n’est pas ce que l’on montre, mais ce que les élèves retiennent.

Maintenant, il n’est pas toujours évident de satisfaire tous les niveaux lorsqu’ils sont rassemblés dans un seul cours. Surtout si l’effectif n’est pas assez important pour créer des ateliers. Il faut pourtant que chacun travail son programme.

Se trouver dans une telle situation, et la gérer, demande un minimum d’organisation. J’y reviendrai à l’occasion d’un autre article.

Aujourd’hui, imaginons un groupe de débutants. C’est sans doute un des cours les plus difficiles à dispenser. Enseigner à des gradés, pour peu que l’on possède un bagage technique correct, est plus facile et d’une certaine façon plus gratifiant.

Tout au long de ma carrière j’ai éprouvé de plus en plus de plaisir à initier et à enseigner à des personnes qui débutent. D’abord ils sont « vierges » de toutes (éventuelles) mauvaises habitudes, ce qui n’est pas rien et ils ont soif de découvertes. Ensuite, il faut s’astreindre à une indispensable patience, trouver les « trucs et astuces » pédagogiques qui facilitent l’acquisition. Tout au long de la leçon, il faut faire preuve d’un savant dosage dans les intensités techniques et physiques. Simplifier et non pas compliquer. S’adapter à l’âge, à la condition physique (surtout si elle est inexistante ou presque).

Les débutants d’aujourd’hui seront les confirmés de demain, donc le professeur a une responsabilité immense. Il ne doit pas les décourager avec un enseignement inadapté.

J’ai connu des professeurs qui avouaient ne pas avoir les clefs et la patience nécessaires pour s’occuper des débutants. Chacun possède ses spécialités, mais si un jour on veut enseigner à des ceintures noires, il faut d’abord que les ceintures blanches aient été bien formées.

Quant aux confirmés, il faut être en mesure de ne pas les lasser et leur donner l’envie de persévérer.

S’adapter et donc ne pas décevoir, ne pas décourager ceux qui ont fait l’effort de franchir les portes d’un dojo. Déjà, avant l’inscription il faut découvrir précisément ce que la personne est venue chercher et le cas échéant la réorienter, chaque art martial possédant ses spécificités. Et puis, si l’enseignant et le dojo doivent plaire à l’élève, l’élève doit aussi plaire au dojo.

En conclusion, s’il est essentiel de s’occuper de tous les échelons, il est indispensable de bien s’occuper des débutants. Un dojo, c’est comme une population, s’il n’y a pas de renouvellement, c’est fatalement l’extinction.

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Ju-jitsu, un rappel utile

Un rappel n’est jamais inutile.

le ju-jitsu, petite fiche technique et la rentrée…

Le ju-jitsu se compose de techniques de coups (atemi-waza), de projections (nage-waza) et de contrôles (katame-waza).

Ses principes de base sont la non opposition et l’utilisation de la force de l’adversaire ; de façon directe ou en utilisant  le principe d’action réaction.

L’utilisation des coups (atemi-waza) aura pour principal objectif de déséquilibrer.

Pour projeter un adversaire (nage-waza) on utilise différents mécanismes. La bascule au-dessus du centre de gravité, la suppression d’un point d’appui ou empêcher l’adversaire de reprendre l’équilibre sur l’avant  ou sur l’arrière, et quelques autres. Comme indiqué plus haut, le déséquilibre nécessaire pourra aussi est provoqué par un coup.

Les contrôles (katame-waza) ont une importance majeure dans la mesure où ils permettent de maîtriser quelqu’un sans forcément mettre ses jours en danger.

En ju-jitsu toutes les défenses sur toutes les situations d’attaque sont étudiées, debout mais aussi au sol.

On apprend à riposter sur des agressions à mains nues ou bien armées.

Des situations de défense contre plusieurs adversaires sont prises en considération.

Pour bien pratiquer le ju-jitsu, il est indispensable de maîtriser les « ukemis », les brise-chutes. Sur l’arrière et sur l’avant. C’est incontournable lors des répétitions, mais également conseillé afin de limiter les dégâts lors d’une perte d’équilibre dans la rue, sur de la glace par exemple.

Le ju-jitsu est une méthode de self défense très efficace, pour peu qu’on la pratique de façon régulière, mais c’est aussi  une “école de vie”. Elle apporte un bien être physique et mental et contribue à une meilleure vie en société.

L’apprentissage des techniques de combat doit avoir comme objectif de ne jamais avoir à s’en servir, sauf cas de force majeure. De plus, dans la pratique, le but est éducatif et non destructif, nous ne sommes pas dans un dojo pour nous faire mal, mais pour apprendre à ne pas nous faire mal.

Concernant le ju-jitsu, il existe beaucoup d’écoles et de styles, celui que je pratique et enseigne est à but non compétitif, de façon à ce qu’il conserve son aspect traditionnel et l’ensemble des ces techniques originelles.

En effet, la compétition impose un règlement et la suppression de certaines techniques jugées, à juste titre, trop dangereuses. De fait, c’est une partie de l’efficacité qui est confisquée.

Quelle que soit la discipline que vous pratiquez, je vous souhaite une bonne rentrée.

Encore quelques mots pour clore cet article en insistant sur le fait que lorsqu’on inscrit en septembre dans un dojo, il faut se faire la promesse d’aller jusqu’au bout de la saison, et bien plus encore.

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Le salut

C’est avant tout un signe de politesse, une marque de respect et une tradition qui ne doit jamais  être sacrifiée. C’est aussi un moment de brève et intense concentration  avant une démonstration, une répétition ou un combat. Et puis, un temps de courte réflexion dans l’instant qui suit ces exercices.

Dans les arts martiaux japonais, le salut est emprunté aux coutumes du pays. C’était tout simplement dans le quotidien la façon de se dire bonjour.

Nous utilisons le salut principalement de deux façons. Debout ou à genoux. Logiquement, avant et après avoir effectué un travail debout, on salue debout ;  il en est de même pour le travail au sol. Dans certains katas ce rite se pratique à genoux et debout pour d’autres.

Au début et à la fin d’un cours, face aux professeurs, il s’exécute  en principe en position agenouillée, mais rien ne s’oppose à ce qu’il soit réalisé debout (surtout si le professeur a mal aux genoux). La position des élèves les plus hauts gradés est toujours sur la droite.

S’il est incontournable, il doit se faire en respectant une bonne attitude. Il ne doit pas être bâclé. Tout d’abord, les protagonistes adoptent une tenue correcte, même après un combat. On prend le temps de se rhabiller, on ne salue pas débraillé. D’autre part, il ne s’agit aucunement de se satisfaire d’un vague mouvement de tête. On prend son temps pour incliner le buste vers l’avant, les mains glissant le long des cuisses en position debout et elles seront posées sur le sol dans la position agenouillée.

Entre élèves et après un travail ou un randori, il se suffit à lui-même. D’autres marques, ne sont pas indispensables, si sympathiques soient elles !

Il est de coutume également de pratiquer le salut en entrant dans le dojo. Il est vrai que cette tradition se perd, elle est remplacée par un seul salut, celui que l’on exécute  avant de monter sur le tatami. Mais l’un n’empêche pas l’autre.

Cet article permet aussi de rappeler que si certains rituels ne sont pas respectés dans nos disciplines à traditions, où le seront-ils ?

Encore une fois, il en est de la responsabilité du professeur. Il est aussi un passeur de valeurs, pas uniquement de techniques.

 

Soulac, le bilan

Ça y est, c’est fini, avant-hier matin nous avons vécu la dernière séance du stage de Soulac.

Il y a un peu plus d’une semaine nous reprenions la direction de la station balnéaire du Médoc, pour renouer, douze ans après, avec une belle tradition qui remontait à l’année 1986.

Le moment est venu de faire un premier bilan.

Bien sûr, il y aurait pu avoir davantage de participants, mais il y aurait pu aussi en avoir moins.

Il faut dire que le climat et l’ambiance générale sont difficiles depuis plus de deux ans (je sais de quoi je parle), et qui plus est, pour ce stage il s’agissait d’un nouveau départ, ce n’est jamais facile de relancer une machine. Et puis, n’ayant plus d’outil de travail depuis deux ans et demi, les réserves sont limitées. A noter, sans doute à cause des incendies en Gironde, un tiers de défections !

Je retiendrai quelques données.

Tout d’abord le stage a rassemblé de la ceinture blanche au 6ème dan, de l’âge de 14 ans à un âge « très adulte », environ un tiers de féminines et une représentation belge conséquente.

Coté ambiance, ce fût particulièrement agréable, c’est souvent le cas, mais là, peut-être davantage. Sans doute le plaisir de pouvoir pratiquer à nouveau intensément dans un endroit privilégié.

La motivation était parfaite, pas une fois un stagiaire n’a manqué, même avec la fatigue, et les inévitables courbatures. Aucune blessure n’est venue gâcher la fête.

Je remercie tous les participants pour cette remarquable assiduité, mais aussi tout simplement pour leurs  présences. Une mention particulière à l’intention de Pascal, mon fidèle et performant Uke !

Personnellement, cela faisait bien longtemps que je n’avais pas renoué avec mon métier six journées de suite. Il faut remonter à l’avant Covid. C’était indispensable pour un moral mis à mal depuis trop longtemps !

Ce fût aussi l’occasion de retrouver de « vieilles connaissances » et de découvrir de nouveaux visages.

Je pense avoir bien équilibré ce stage, tant au niveau technique que physique, c’est ce que me laissent penser les différentes discussions que j’ai eu avec les stagiaires.

Cette semaine, ça été aussi l’occasion de retrouver Soulac, personne n’ignore l’attachement que j’ai avec ce lieu. Même si au cours des dernières années la petite station a gagné en fréquentation, elle reste un endroit où je me sens bien.

Nous nous sommes quittés vendredi midi en nous promettant de nous revoir au cours de la prochaine saison et vraisemblablement l’été prochain au même endroit.

J’en profite pour remercier la municipalité et Xavier Pintat, le maire de la commune et Sénateur Honoraire. Nous nous connaissons depuis le début de l’aventure des stages soulacais.

Maintenant, quelques jours de repos avant une nouvelle saison. La semaine prochaine, je ne manquerai pas d’aborder les projets qui y sont attachés.

Au fil des mois et des émois !

Nous sommes au 2/3 de ce que l’on nomme la « saison sportive ». Ceci dans la mesure où l’on considère qu’une telle saison se finit le 30 juin et que par conséquent la suivante commence le 1er juillet.
Toujours est-il qu’ayant ouvert notre dojo le 1er juillet, nous sommes à quatre mois du premier anniversaire de ce lieu de partage !
Il n’est pas encore temps d’établir un bilan complet, mais simplement d’évoquer les points positifs et quelques autres.
En huit mois, beaucoup de choses se sont passées et diverses impressions et émotions ont pu s’exprimer.
D’abord il y a la joie liée à la réalisation d’un projet. Même si les difficultés sont importantes, les surmonter et aboutir sont autant de plaisir que seuls connaissent ceux qui ont la chance de pouvoir (ou de vouloir) le faire !
Chaque étape apporte ses propres sentiments. Du tout début de l’aventure lorsque l’on est dans la prospection avec les visites de locaux, jusqu’au tout premier cours que l’on assure, en passant par le suivi des travaux, notamment pour qu’il n’y ait pas de retard et que le dojo puisse être inauguré à la date prévue ; ce qui a été le cas au début du mois de juillet dernier.
Ensuite, même en plein été, tout va très vite, beaucoup de choses se passent ; des demandes de renseignements, des visites de curiosité, de politesse et d’amitié (qui font chaud au cœur et rendent insignifiantes les négligences et les coupables ingratitudes), les toutes premières séances dans lesquelles se mélangent novices et anciens ravis de retrouver « leur ju-jitsu », et je n’oublie pas la sueur sur tous les fronts, surtout l’été dernier ! Ensuite vient la rentrée, avec beaucoup de demandes de renseignements, d’initiations et d’inscriptions. Un brassage de population – aux niveaux techniques différents, représentant diverses professions, mais ayant en commun le désir de poursuivre ou de commencer la pratique d’un art martial accessible physiquement, et dans laquelle ne suinte aucune violence ! J’insiste sur ce point. En effet certains propos qui m’ont été rapportés sont édifiants ! Les mauvaises expériences sont légion et il est heureux qu’elles ne soient pas rédhibitoires pour la totalité de ceux qui les ont subies. Certaines pratiques font beaucoup de mal aux arts martiaux (et aux pratiquants) !
Une installation dans un nouveau quartier, même si celui-là ne m’est pas vraiment inconnu, ce sont de nouveaux voisins, une ambiance différente, de nouvelles habitudes, bref un environnement dans lequel il faudra se fondre.
Au bout de quelques semaines un rythme s’établit et l’on est heureux de voir s’élargir le cercle des élèves !
Certes, il ne serait pas objectif d’éluder les aspects négatifs, surtout que depuis le mois de décembre ils ne manquent pas. Des événements contre lesquels, tout du moins à notre modeste niveau, nous ne pouvons pas grand chose. D’abord la plus grande grève de l’histoire des transports en France et maintenant un virus « bizarre » ! Cela ne manque pas de perturber notre quotidien dans tous les domaines.
Quoiqu’il en soit, la volonté est une vertu qui ne manque pas à qui a consacré sa vie aux arts martiaux ; c’est dans cet état d’esprit que j’aborde la dernière partie de cette saison qui aura été celle d’un nouveau challenge que certains qualifiaient d’ambitieux (avais-je d’autres choix ?). Les obstacles sont faits pour être franchis et les problèmes pour être résolus. Lorsque l’on possède l’envie d’avancer et de créer, on avance deux fois plus vite. « Créer, c’est vivre deux fois ». Albert Camus.

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Randori

Il y a quelques semaines j’avais consacré un article aux méthodes d’entraînement. Parmi elles, il y a le randori, l’équivalent, en boxe, de l’assaut que l’on nommait aussi « l’assaut courtois », il y a un certain temps.

Le randori, ou l’assaut, c’est un peu la récompense de fin de séance. C’est le moment où l’on peut tester nos techniques dans un système d’affrontement très codifié et axé sur l’initiative, c’est-à-dire sur l’attaque ; l’aspect ludique ne doit jamais être absent de ces joutes respectueuses  avec lesquelles on perfectionne aussi la défense, puisqu’il est nécessaire de tenter d’esquiver les initiatives du partenaire.

Malheureusement, trop souvent le randori  est quelque peu dénaturé et confondu avec le « shai », c’est-à-dire le combat, la compétition (en judo, par exemple). C’est dommage. Ceci étant tout dépend des objectifs, ceux-ci ne sont pas les mêmes selon que l’on se situe dans une pratique loisir ou bien à l’occasion d’entraînements  de haut-niveau ; même si à ce stade là il devrait -aussi – être indispensable de ne pas négliger cet exercice.

En ju-jitsu on peut le pratiquer dans le domaine des coups (atemi-waza), des projections (nage-waza) et du sol (ne-waza).

Le but du randori est avant tout de se perfectionner et d’essayer (en fonction du secteur dans lequel on souhaite le faire) de « passer » des techniques, d’aboutir et de résoudre différentes situations d’opposition ; pour les projections, de tenter de faire tomber un partenaire qui s’oppose intelligemment. C’est volontairement que j’utilise le mot de partenaire et non pas d’adversaire. Du latin par (avec) et ad (contre). C’est-à-dire que dans le randori, le partenaire travaille avec moi et non pas contre moi, il m’aide à progresser en proposant une opposition raisonnée, m’obligeant à travailler ma vitesse d’exécution, ma réactivité, ma condition physique, mais aussi – fatalement –  un système de défense axé exclusivement sur les esquives et non pas à l’aide de blocages qui annihilent toute initiative et par conséquent tout progrès. Imaginons deux joueurs de tennis à qui on « confisque » la balle !

Dans certains randori de projections ont peut même exclure toute technique de « contre direct » et n’autoriser que les contres répondant à l’appellation « go-no-sen » (l’attaque dans l’attaque). Le contre peut faire des dégâts physiques, mais aussi phycologiques en  limitant les initiatives de peur de subir un contre ravageur ; ce qui limitera obligatoirement les progrès.

Il y a très longtemps je bénéficiais de l’enseignement d’un professeur de boxe française, Marcel Le Saux, qui comparait l’assaut poing-pied à une conversation. Chacun s’exprimant à tour de rôle en développant ses arguments, évitant de parler en même temps et trop fort, pouvant couper la parole poliment si l’opportunité se présente, mais surtout en ne proférant ni invective, ni grossièreté. Belle métaphore.

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Souvenirs d’une belle préface

Christian Quidet (1932-2010) a été un très grand journaliste spécialisé dans le sport et notamment dans le judo. Dans les années 1970 il a beaucoup aidé cette discipline à franchir la barrière des médias.  Il a aussi occupé le poste de  directeur des sports sur « Antenne 2 », l’ancienne appellation de France 2, dans les années 1980. Nos disciplines martiales l’intéressaient au plus haut point, il leur a d’ailleurs consacré un magnifique ouvrage : « La fabuleuse histoire des arts martiaux ». En 1985, avant la parution de mon premier livre, je lui avais demandé s’il voulait bien m’honorer d’une préface ; il a accepté spontanément.  A  l’attention de ceux qui ne connaissaient pas ces quelques belles lignes, c’est avec plaisir que je les mets à nouveau  en ligne. D’autant plus que je trouve cette préface terriblement d’actualité.

     « La publication d’une progression française de ju-jitsu est un acte plus important qu’il n’y paraît. C’est la restauration, en France, du trésor des samouraïs qui, au fil de l’histoire, ont porté l’art du combat individuel à un degré de perfectionnement et de raffinement unique au monde.
       Cette version moderne de la self-défense japonaise, présentée par Eric Pariset, met à la disposition des éducateurs sportifs une méthode claire, précise et efficace.
       Elle offre à celles et à ceux qui s’en inspirent un bagage technique inestimable. Non pour leur apprendre à se battre mais pour dissuader les autres d’attaquer.
        C’est en ce sens que je crois beaucoup à la vulgarisation de la self-défense dans notre pays. Comme un remède à l’agressivité qui enlaidit notre société actuelle.
       Je félicite Eric Pariset de s’être intéressé et de s’être spécialisé dans le ju-jitsu qui est le meilleur complément à la pratique du judo.
       Le ju-jitsu ne doit pas être mis entre toutes les mains et ne peut être enseigné valablement que par ceux qui ont adhéré à l’esprit de son fondateur, le maître Jigoro Kano.
       Eric Pariset est de ceux-là. Il a été élevé dans une famille où les arts martiaux étaient considérés comme un Art et pratiqués comme une passion. Son père, Bernard Pariset, a participé au premier championnat du Monde au Japon en 1956 et a obtenu une superbe quatrième place. Plusieurs fois champion d’Europe il a légué, comme  les maîtres japonais d’autrefois, son savoir et sa sagesse à Eric.
      Ceinture noire, 5e Dan de Judo-Ju-Jitsu, Eric Pariset a été champion d’ile de France de Judo en 1983.
       Il s’est ensuite, spécialisé dans les démonstrations de Ju-Jitsu et de self-défense pour devenir, à   31 ans, le meilleur spécialiste français de cette discipline.
      « N’enseigne pas toute ta science à ton élève, qui sait s’il ne deviendra  pas un jour ton ennemi ».
       Fort heureusement, Eric Pariset n’a pas appliqué cette devise  chère aux anciens Maîtres d’armes japonais.
       Je l’en remercie et j’espère que vous serez nombreux à profiter de sa générosité.»

Christian Quidet.
Responsable du service des Sports d’Antenne 2*
Avril 1985.

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Les méthodes d’entraînement

La semaine dernière,  le vendredi à thème était consacré aux « méthodes d’entraînement ». A l’aide de ce billet hebdo, j’ai souhaité donner ma conception de ces exercices incontournables qui viennent en complément de l’apprentissage technique. Ce sont des exercices de renforcement possédant chacun dans son domaine une spécificité. Ils permettent de renforcer la vitesse, les automatismes, la tonicité, la forme de corps, le placement, les déplacements, etc. Ils renforcent ces qualités  dans le domaine de l’atemi-waza (le travail de coups), le nage-waza (les projections) et aussi dans le ne-waza (le travail au sol). Ils  peuvent se faire seul ou à deux (le plus souvent), mais aussi à plusieurs, statiques ou en déplacement.
Il y a les exercices qui consistent à faire d’inlassables répétitions sans aucune opposition de la part du partenaire et d’autres qui se font avec une opposition plus ou moins importante, mais toujours conventionnelle.
Par conséquent on peut définir deux groupes : le premier où le partenaire ne produit aucune opposition et le second au cours duquel  il offre une certaine résistance qui permet de se renforcer en situation d’opposition relative.
La plus connue de ces méthodes d’entraînement est l’uchi-komi ; elle consiste à répéter une technique de projection sans faire chuter, juste en soulevant le partenaire. On peut aussi effectuer cette répétition dans le domaine de l’atemi-waza et du ne-Waza. L’uchi-komi peut s’effectuer dans « le vide », c’est-à-dire tout seul, mais le plus souvent avec un partenaire.
On trouve ensuite (plus particulièrement dans le domaine des projections) le nage-komi qui consiste à se faire chuter à tour de rôle, ou plusieurs fois de suite. Et puis, il y a le randori (qui n’est pas un véritable combat) et qui offre un travail en opposition « mesurée », sur un thème précis, au sol et debout, en atemi-waza et en projections. On oublie bien trop souvent des exercices tels que le kakari-geiko et le yaku-soku-geiko. Le premier permet à Tori de renforcer son système d’attaque sans la peur de contre prise de la part d’Uke. Celui-ci se contentant d’essayer d’esquiver les initiatives de Tori, l’obligeant ainsi à s’adapter et à trouver d’autres solutions.
Le second, le yaku-soku-geiko, permet aux deux protagonistes de se faire chuter chacun son tour. Une sorte de nage-komi en déplacement. (Il peut également être pratiqué en atemi-waza.) On peut faire une variante en y ajoutant une certaine opposition, sans contre prises, juste à l’aide d’esquives. Ces exercices sont bien évidemment axés sur l’initiative.
Une autre méthode – que mes élèves connaissent bien – consiste à répéter une technique de défense sur une situation précise, puis une seconde et de les enchaîner vite et fort, sans temps d’arrêt ; de même avec une troisième et ainsi de suite, jusqu’à six, ce qui est déjà très bien.
Enfin, on peut aussi considérer les katas comme des méthodes d’entraînement, puisqu’ils sont le reflet d’un combat. Un combat pré arrangé, certes, mais qui permet d’affûter les techniques et d’acquérir des automatismes.
Il est certain que ces exercices, lorsqu’ils sont réalisées avec un partenaire, offrent un côté ludique qui n’existe pas quand on s’entraîne seul ; le plaisir se retrouvera alors dans les progrès réalisés grâce à la rigueur que l’on se sera imposée lors de ces répétitions qui parfois peuvent sembler un peu ingrates, mais ô combien utiles. Alors, au travail !
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Quelques exemples

Cet article est en quelque sorte la suite de celui proposé le 21 janvier dernier. Il était question de self-défense, un sujet qui ne cesse de passionner, ce qui semble normal ; être en capacité de défendre son intégrité n’est pas extraordinaire, y parvenir n’est pas acquis d’avance.
Tout au long de ma carrière d’enseignant, j’ai pu recueillir de nombreux témoignages d’élèves ayant subi des agressions qui n’étaient pas la conséquence de provocations  tendant à démontrer qu’il faut être confronté « à la rue » pour se tester. Ces personnes, jeunes ou moins jeunes, pratiquantes de haut-niveau ou pas, hommes ou femmes, ont réussi à se sortir de mauvaises situations grâce à leur pratique du ju-jitsu, mais aussi du judo ou du karaté. Sans doute est-ce le cas grâce à d’autres disciplines.
J’ai déjà évoqué le sujet à plusieurs reprises. Aujourd’hui, c’est l’illustration avec quelques exemples qui m’ont été rapportés par les personnes elles-mêmes que je propose. Les noms ont été changés. Ces histoires, véridiques, prouvent, si besoin était,  que les pratiques en tenue martial, dotés d’objectifs qui ne se limitent pas à la bagarre de rue, ne sont pas incompatibles avec une efficacité certaine.
Jean-Pierre, pratiquant depuis quelques semaines, en vacances dans « les îles », a pu « faire face » à un tesson de bouteille manié par un individu qui manifestement ne lui voulait pas que du bien, cela grâce à une simple clef au bras (ude-gatame). Solange, ceinture noire de ju-jitsu, a pu mettre en dehors d’une rame de métro un voyageur qui ne cessait d’importuner les autres, et cela  à l’aide d’un simple tai-sabaki (déplacement du corps). Avec un  mae-geri (coup de pied de face) bien placé (ou mal placé, selon le camp dans lequel on se trouve) Viviane n’a pas hésité à condamner les ambitions perturbatrices d’un homme sur un quai de métro. C’est avec un autre coup de pied, yoko-géri, que Martin à « ruiné » le genou de celui qui avait jeté son dévolu sur sa sacoche. Martin était ceinture blanche, il sortait d’une séance durant laquelle avait été effectué un travail important sur ce « coup de pied de coté ».  Jean, ceinture noire 4ème dan, policier de son état doit son salut (et peut-être celui d’autres personnes) à un waki-gatame de bonne facture sur un bras armé d’un revolver. Alain, gradé en judo et en aïkido a pu faire face à une autre menace de revolver (factice, mais il l’ignorait) à l’aide d’une technique de désarmement que l’on retrouve par ailleurs dans le goshin-jitsu.
Ces quelques exemples, mais il en existe d’autres, prouvent si besoin est que la pratique d’un art martial peut être utile pour se sortir d’une mauvaise situation et même pour sauver sa vie. Cependant, rien n’est jamais acquis, plusieurs facteurs doivent être pris en considération ;  la chance, en premier lieu, la maîtrise technique, un peu de condition physique, mais aussi la capacité à ne pas perdre ses moyens dans une situation exceptionnelle. Il n’est pas inutile de rappeler qu’éviter toute confrontation, à l’issue fatalement incertaine, est la solution la plus sage.
Il m’a aussi été rapporté des histoires qui ne se sont pas aussi bien terminées, mais c’était de la part de personnes qui ne pratiquaient pas encore ; ces tristes expériences ont bien souvent motivé des inscriptions dans un dojo et curieusement – et heureusement – il n’a plus été question d’agression. Sans doute une confiance en soi ressentie par l’agresseur potentiel et l’évaluation de certaines situations à risque.
Quant à un troisième cas de figure, justement, c’est-à-dire celui d’un pratiquant dans l’incapacité de se défendre, aucun exemple ne m’a été confié ; peut-être par amour-propre ou encore parce que ce n’est pas arrivé, tout simplement. Que cela ne fournisse surtout pas la prétention, la bêtise et l’irresponsabilité de se croire invincible !