Sutemi-waza

A l’occasion d’une une semaine calme, je propose une rediffusion.

Ils sont l’illustration parfaite du principe de non opposition et de celui de l’utilisation de la force de l’adversaire.

Dans notre langue, nous les appelons les « techniques de sacrifices », en effet, pour les appliquer il faut s’effacer devant l’adversaire en se mettant volontairement au sol, sur le dos ou le flanc : se sacrifier.

De fait les sutemis sont praticables par tous les gabarits et notamment les plus faibles. Par conséquent, une fois « bien maîtrisés », leur efficacité est redoutable. Tomoe-nage la fameuse « planchette japonaise » est le plus célèbre d’entre eux.

Dans leur exécution, non seulement on ne s’oppose pas à la force de l’adversaire, mais on y ajoute la nôtre. Même avec peu de toute puissance, il suffit de « conduire » celle de l’opposant. A partir de là, « tout le monde peut faire tomber tout le monde ». Nous sommes au cœur de l’efficacité du ju-jitsu tel qu’il doit être enseigné et pratiqué.

Certes sans action offensive de l’adversaire, il est impossible d’appliquer ces principes d’addition de force, mais le ju-jitsu (bien présenté) a toujours revendiqué le titre de méthode de défense et non pas d’attaque.

En judo, avec l’avènement de la compétition et des catégories de poids, certaines projections ont dû être adaptées, c’est le cas des sutemis ; dans la mesure où, à technique (presque) équivalente et à poids égal, les principes de base n’ont plus les même effets, y compris celui de la surprise pour la personne qui en agresse une autre et qui n’envisage pas que celle-ci puisse se défendre en utilisant de telles techniques.

Le meilleur exemple d’adaptation, pour lequel on peut presque utiliser le terme de nouvelle technique (apparue à la fin des années 1960), s’appelle tomoe-nage avec l’apparition du yoko-tomoe-nage. Cette dernière forme ne trouvant sa raison d’être que dans le randori et le combat de judo. Il n’existe pas vraiment d’applications en self défense. Une analyse approfondie de cette belle technique pourra faire un beau sujet par la suite.

Il y a donc des différences techniques mais aussi d’utilisation selon que l’on se trouve dans le cadre de la (self) défense ou bien dans celui du judo. Ne serait-ce que dans la rue, sur un sol dur, nous nous placerons sur le dos qu’en dernière analyse, lorsque la poussée est tellement forte que nous sommes déjà en déséquilibre et que l’application de techniques comme hiza-guruma, par exemple, qui nous laisserait debout, n’est plus possible. A l’inverse, en judo les sutemis peuvent être pratiqués directement, comme toute autre technique.

Il existe aussi les « makikomi », ils sont un peu les « cousins » des sutemis. Littéralement, il s’agit de techniques d’enroulement. Le corps de Tori venant au contact de celui d’Uke pour l’entraîner jusqu’au sol. La différence essentielle réside dans le fait que pour les sutemis, il y a séparation des corps durant l’action et que pour les makikomi, c’est l’inverse. L’efficacité se réalisant dans le plus étroit contact entre les deux protagonistes (au profit de Tori, évidemment, qui emmène le corps d’Uke avec le sien dans une synergie rotative). Le point commun étant que dans les deux cas l’idée est d’entraîner l’adversaire au sol en y allant volontairement.

La maîtrise de ces « techniques de sacrifices » requiert de la patience, comme beaucoup d’autres, mais leur parfaite exécution – qui donne l’impression d’agir sans aucun effort et même de façon un peu magique – procure peut-être une joie supérieure à celle ressentie dans la réalisation d’autres projections. C’est en tout cas un sentiment que je ne pense pas être le seul à partager.

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Bloc-notes post rentrée

A mi-parcours du premier trimestre de la saison en cours, voici quelques réflexions et constats.

La rentrée.
Après les dégâts  causés par la crise sanitaire, l’année dernière j’ai pu renouer avec une (petite) activité régulière à l’IME de Niort. Ce mois de septembre célébrait le premier anniversaire d’une nouvelle aventure. La rentrée, c’est le plaisir de retrouver ceux qu’on appelle « les anciens ». Ils ont envie de continuer, je ne peux que les remercier pour leur fidélité et saluer leur détermination.  Malheureusement, comme chaque année, on constate des abandons. Les raisons sont diverses, parfois on ne fait pas ce que l’on veut. Il n’est pas toujours facile de tout concilier. Par contre, lorsqu’on a arrêté, il n’est pas impossible, ni interdit  « de reprendre », même si ce n’est pas évident de remettre le pied à l’étrier. On ne sera jamais déçu d’avoir fait preuve de détermination.

La rentrée, c’est aussi le moment d’accueillir de nouveaux élèves. Accueillir est le bon mot. Le rôle du professeur est important, mais celui des élèves déjà inscrits, l’est aussi. La tradition qui consiste à aider ceux qui débutent doit perdurer, ne serait-ce qu’en souvenir d’un temps où nous étions des novices bien contents de bénéficier de l’aide des « anciens » que nous allions d’ailleurs devenir. Dans certaines disciplines, les débuts ne sont pas toujours évidents, parfois il faut se « discipliner » pour ne pas lâcher.

Self défense
Déjà évoquées dans un précédent long article, voici quelques réflexions sur un thème qui est source de débats, entre ceux qui pensent que cela ne sert à rien d’apprendre à se défendre et ceux qui ne sont pas avares d’auto satisfactions et bien d’autres façons de penser. Je reviendrais juste sur le fait que nul n’est invincible, mais qu’à l’inverse, il existe beaucoup d’exemples de personnes qui se sont sorties d’affaires grâce à une pratique régulière dans un dojo. Affirmer que ce que l’on apprend dans ce lieu ne sert à rien, c’est remettre en question des siècles d’étude et de pratique des « sciences du combat ». Et puis, il y a plusieurs sortes d’agressions et de situations, on ne tombe pas toujours sur des « professionnels » de la bagarre, souvent il s’agit d’embrouilles qui peuvent dégénérer. D’autre part, n’y a pas deux situations identiques. L’invincibilité n’existe pas, mais apprendre à se défendre est loin d’être inutile. A la condition d’être avec les bonnes personnes.

La « Rue des Martyrs ».
Chaque semaine je propose un article qui traite d’un sujet, d’une technique, d’une personnalité, d’un événement, ou encore d’un lieu particulier.  Ces dernières semaines, c’est l’article consacré au dojo mythique de la rue des Martyrs qui a connu le plus grand succès. Rien d’étonnant et je me range forcément du côté de tous ceux qui ont connu directement ou indirectement ce lieu que l’on ne peut oublier et qui s’en souviennent avec une certaine nostalgie. Il a marqué plusieurs générations.

Stages
Les stages occupent une partie importante de mes activités. Depuis la reprise en septembre dernier, il y en a eu deux. D’abord à Paris, le 24 septembre avec un groupe de fidèles à ces rendez-vous réguliers, mais aussi avec quelques nouveaux visages que l’on accueille toujours avec plaisir. Et puis, le week-end dernier, il y a eu une « première » à Blagnac, proche de Toulouse. Une première édition qui va sans doute en appeler d’autres, dans la mesure où ce stage a connu un beau succès. Il était magistralement organisé conjointement par le « Blagnac Arts Martiaux » et le « Club de Nailloux »  et leurs responsables : Jean-Louis Mourlan, Agnès Francastel et Pascal Toudouze. Merci à eux et à tous ceux qui nous ont rejoints. Le prochain stage se déroulera le 12 novembre aux Pays-Bas, où je suis une nouvelle fois invité. Prochainement il y aura Paris le 19, Fontenay-le-Comte le 26 novembre et Léognan le 10 décembre.

Open Taekwondo de Poitiers
Dimanche prochain, je suis invité pour assister à une compétition de Taekwondo à Poitiers. Je remercie Sylvie Marchais, coorganisatrice de l’évènement, pour cette attention et c’est avec grand plaisir que je m’y rendrai. Mon ouverture d’esprit et l’esprit de partage seront satisfaits.

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Goshin-jitsu-no-kata : un point de vue

« Dé-kata-iser ». Peut-être que ce néologisme surprendra, mais je n’ai rien trouvé de mieux pour exprimer un point de vue personnel.

Le goshin-jitsu-no-kata, ou « système de self défense du kodokan », a été créé par Maître Tomiki. Il l’a présenté à l’occasion des premiers championnats du monde de judo qui se déroulaient à Tokyo en 1956.

L’objectif était de démontrer que même si le judo devenait un sport de compétition, il ne fallait pas oublier ses aspects utilitaires et traditionnels.

Un kata est une suite de techniques, un enchaînement. Il véhicule des principes et des techniques au fil des ans et des siècles. C’est une méthode d’entraînement, un moyen d’évaluation pour l’obtention des grades et un exercice de style.

Il en existe beaucoup, chacun ayant sa spécificité. Le goshin-jitsu rassemble vingt et une techniques de défenses à mains nues et armées.

Comme tout kata, sa présentation, pour un passage de grades ou une démonstration, doit être entourée d’une certaine rigueur. On respecte l’ordre, les déplacements doivent être exécutés avec une attitude empreinte de solennité. Cependant l’efficacité est le premier objectif.

Alors, je pense, tout du moins pour ce kata, qu’il faut débuter l’étude par cet aspect là, avant d’entrer dans les détails qui parfois rebutent. Au même titre que le sculpteur commence par « la masse » avant de s’atteler aux finitions.

En fait, l’idée est de sortir chaque technique du contexte du kata, pour la travailler dans son utilité première : une attaque, une riposte. En fournissant des explications sur certains points qui peuvent sembler obscurs.

Par exemple, dans la première technique, Uke saisit les poignets de Tori pour l’empêcher de se défendre avec les mains. Celui-ci est donc contraint de reculer une jambe pour ne pas recevoir le coup de genou que veut lui administrer Uke.

Pour la quatrième technique, il est souhaitable d’expliquer ce que représentent les trois pas de déplacement sur la saisie de côté après qu’Uke se soit emparé du bras de Tori pour le pousser. Le premier pas, je suis surpris et je cède à la poussée. Le deuxième, je reprends mon équilibre. Au troisième, je prends l’initiative en portant un yoko-geri qui sera enchaîné avec un waki-gatame.

Chaque technique mérite d’être extraite du kata et travaillée pour sa première raison d’être (l’efficacité). Ensuite, on les assemble dans l’ordre où elles doivent être présentées et on impose progressivement ce qui fait un kata : les déplacements, les postures, etc.

Ayant testé cette méthode, j’ai pu constater que la perception du kata était davantage recevable, et que de fait il ne représentait pas seulement (pour certains) une « purge » que l’on doit s’administrer avant de passer un grade, de fait il devient plus concret, donc plus accessible. C’est aussi une façon certaine de revaloriser ces exercices qui sont « un plus ».

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Un petit tour par la rue des Martyrs

Des dojos, j’en ai fréquentés et dirigés beaucoup, pour étudier, me perfectionner, m’entraîner, transpirer et bien sûr enseigner.

Le premier a été celui de la rue des Martyrs, dans le neuvième arrondissement parisien, le célèbre « Club français » ! Fondé juste à la fin de la seconde guerre mondiale par Roger Piquemal, professeur de sports converti au judo, ce lieu a marqué beaucoup de pratiquants.

C’est dans cet endroit que j’ai revêtu mon premier judogi, j’y ai appris mon métier et j’ai commencé à l’exercer. C’est là aussi, en 1947, que mon père, Bernard Pariset, a débuté le judo, intrigué et fasciné, comme beaucoup de ses contemporains, par cette « lutte mystérieuse » venue d’orient et grâce à laquelle les plus petits pouvaient faire tomber les plus grands. Il ne s’en n’est pas privé tout au long de sa carrière.

Situé au cœur de Paris, tout en bas de cette rue des Martyrs qui traverse une partie du IXème arrondissement pour se terminer au pied du Sacré-Cœur, le Club Français a été l’un des premiers clubs de judo et de ju-jitsu ouverts dans notre pays, mais aussi l’un des plus célèbres des débuts de l’histoire des arts martiaux en France. Pas seulement pour ses résultats sportifs, mais aussi pour la qualité de l’enseignement dispensé et pour les nombreuses personnalités reçues. Bref, pour l’ensemble de son histoire.

Minoru Mochizuki ( immense personnalité des arts martiaux) a séjourné dans l’appartement situé au-dessus. Pendant une période les entraînements de l’équipe de France de judo s’y déroulaient. Une des premières sections de karaté a vu le jour sous la houlette de Jacques Delcourt, le président historique de la Fédération française de cette discipline.

Au début du XXème siècle, ce vaste local avait déjà été une salle de sport. A l’origine ce devait être une cour commune à plusieurs bâtiments, avant d’être un lavoir et/ou des écuries.

Puis il est devenu un endroit où l’on pratiquait de la « Culture Physique », mais aussi de la Boxe anglaise. En effet, il n’y pas si longtemps le nouveau propriétaire qui gère un cabinet d’architecte a découvert, en retirant les couches de feutres et la bâche qui les recouvraient (les tatamis n’étaient pas les mêmes qu’actuellement), qu’un ring de boxe y avait été installé au milieu. Quatre plaques de fer rivées dans le plancher et sur lesquelles devaient être fixés les poteaux qui formaient le carré en attestent.

Au milieu des années 1980, alors que j’étais en plein cours, un beau matin une dame âgée entre dans le dojo et m’informe que, bien avant la seconde guerre mondiale, cette salle appartenait à la famille Rothschild et que tout au fond, dans un espace clos, pour ne pas dire caché, étaient dispensés les tous premiers cours de judo en France. Cette dame m’avait également appris que l’appartement qui surplombait le dojo, et qui avait été successivement celui de Roger Piquemal, puis celui de mon père, était une mezzanine qui accueillait les visiteurs. De cet endroit, ils pouvaient assister aux entraînements en toute convivialité, autour d’un verre.

Fermé durant le second conflit mondial, le local a été repris par Roger Piquemal en 1944. Il en a assuré la direction jusqu’en 1954, l’année de sa disparition. A compter de cette date, c’est mon père qui a pris le relais – et de quelle manière – jusqu’à sa propre disparition en 2004.

A partir de l’âge de cinq ans j’y ai commencé une pratique avec plus ou moins de plaisir. Comme il s’agissait du métier de mon père, je devais y voir une certaine forme d’obligation, je dois avouer que l’enthousiasme n’était pas toujours au rendez-vous, même si je faisais preuve de régularité.

Ce n’est qu’à l’adolescence que la plus grande partie de ma formation s’est faite et que j’ai découvert une passion qui ne s’est jamais éteinte.

J’ai exercé mon métier rue des Martyrs jusqu’en 1989 ; ensuite, j’ai souhaité prendre mon indépendance.

Tout a une fin en ce bas Monde et le dojo mythique a fermé ses portes en 2005, un an après la disparition de mon père. Ne bénéficiant pas d’issue de secours et face à l’impossibilité d’en créer une, il a fallu se faire une raison et s’incliner devant des mesures de sécurité de plus en plus importantes ; ce lieu ne pouvait plus recevoir du public, tout du moins au dessus d’un certain nombre, ce qui condamnait sa survie. Plusieurs années après, je ne peux l’oublier.

Aujourd’hui, c’est une architecte talentueux qui a investi les lieux pour y installer ses bureaux et son appartement.

La première photo d’illustration présente le dojo au début des années 1950. La seconde à la fin de ces années-là.

Sur la première il s’agit d’une vue d’ensemble prise de la mezzanine. On y voit sur le mur du fond la photo grandeur nature de Roger Piquemal, le maître des lieux de l’époque et sur la droite, debout, mon père qui donne son cours. A l’époque il n’était pas encore le patron, mais le professeur principal. A noter les judogi pendus sur les côtés. Très peu de pratiquants possédaient leur tenue. Les kimonos ne devaient pas être lavés très régulièrement, ce qui expliquait une certaine odeur qui prenait à la gorge lorsqu’on entrait dans la salle.

La deuxième photo a été prise un peu plus tard. Père et fils dans la petite cours que l’on franchissait avant d’entrer et devant la vitrine dans laquelle on constate que le club s’est d’abord appelé « Club Français de Jiu-jitsu ». On y revient régulièrement à cet art martial indestructible qui bénéficie de la « force de sa vérité ». Voilà une formule que j’aime bien.

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Ce métier que j’aime

Dans le prolongement de l’article de la semaine dernière consacré à la conscience professionnelle, j’ai voulu aborder ce que j’appelle « mon métier » et la passion qui l’entoure.

C’est toujours mieux d’aimer son métier et d’ailleurs je préfère ce mot à celui de travail. Un métier on l’a souvent choisi. Parfois il s’est imposé et nous l’avons apprivoisé.

Même si j’ai effectué beaucoup de démonstrations pour promouvoir ma discipline, ma tâche principale a été, et est toujours, l’enseignement.

Si j’aime ce métier, c’est pour quelques raisons ; la principale étant le partage d’un art avec lequel je me suis tout de suite senti en phase, bref un art qui me va bien.

Ceci grâce à sa pluralité technique, à ses principes de bases comme celui de l’utilisation de la force de l’adversaire, aux mécanismes naturels, bref une discipline intelligente pour peu qu’elle soit enseignée dans le respect de ses fondamentaux.

Un art dans lequel il est davantage question de maîtriser que d’exterminer, dans lequel la finesse technique prend le pas sur la brutalité.

Et puis, justement, une discipline dans laquelle l’éducation physique et mentale est incontestable. Mais aussi dans laquelle « on s’amuse », nous sommes également dans le loisir. On s’amuse et on progresse continuellement, pour l’efficacité, mais tout simplement pour éprouver la satisfaction procurée par les progrès. Ce qui est bon pour la tête est bon pour le corps et le contraire.

J’aime ce métier parce qu’il permet la rencontre et les échanges entre toutes les classes sociales et rien n’est plus agréable de voir un jeune employé tutoyer un cadre supérieur quinquagénaire, pour le conseiller et le rassurer lors d’une première séance.

J’aime ce métier parce que j’enseigne à des pratiquants de tous âges, de toutes conditions physiques, auxquels il faut savoir s’adapter.

J’aime ce métier pour l’entraide qui règne dans un dojo, mais aussi à l’extérieur grâce à de solides relations nouées dans le dojo en question.

J’aime ce métier quand certains élèves me confient que la pratique leur a apporté énormément dans leur quotidien, en dehors des tatamis et même « beaucoup plus » que ce qu’on peut imaginer. Je n’irais pas jusqu’à dire qu’on possède le pouvoir de changer la vie (comme dans la chanson de Jean-Jacques Goldman) mais un peu quand même. Bref, être utile. Et tout simplement constater le plaisir éprouvé par un pratiquant à la recherche de la finesse technique et plus encore lorsqu’il s’en approche. µ

J’aime mon métier car, ayant eu la chance que ce soit mon unique activité professionnelle, j’ai pu m’y consacrer pleinement. Ce qui, il faut l’admettre, est de plus en plus rare, ceci est un autre sujet.

J’aime mon métier parce qu’il consiste à enseigner une discipline qui a su traverser les siècles, avec des hauts et des bas, renaissant toujours des ses cendres. Il n’est pas question d’obstination, juste de bon sens et de fidélité en ce qu’on croit, surtout lorsque c’est juste. Enseigner une discipline d’une telle richesse technique, cela me semble intemporel. Tout comme partager des valeurs utiles à la société dans son ensemble. Et puis, en le diffusant, rendre au ju-jitsu ce qu’il m’a donné.

J’aime encore davantage mon métier quand on me laisse l’exercer !

Enfin, j’aime ce métier parce que même si, avec le temps, les capacités physiques s’amenuisent, il n’en est rien pour la passion de transmettre, bien au contraire.

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La conscience professionnelle

Conscience professionnelle (utile en début de saison).

Elle a toujours guidé mon action et encore davantage au fil des ans. L’expérience venant s’ajouter à l’idée que l’on se fait de la profession exercée.

La conscience professionnelle ne se limite pas à arriver à l’heure pour donner ses cours, et même en avance afin d’accueillir les élèves, ni d’éviter de se faire remplacer sauf cas de force majeur ; ce sont des évidences.

On veillera également à la façon de s’adresser à ses élèves (le respect, ça se partage), tout comme être exemplaire en termes d’hygiène corporelle et vestimentaire. La conscience professionnelle, c’est aussi faire en sorte que ce qui est enseigné soit entouré de précautions limitant les risques de blessures. Certes, dans les disciplines de combat, comme dans toute activité, forcément on ne peut éviter quelques « bobos ». C’est au professeur de proposer une pratique sécuritaire, lors de l’étude technique et surtout dans les combats d’entraînement. La priorité est d’éduquer et non pas d’abîmer. Apprendre des techniques de combat pour se rassurer, mais aussi pour évoluer physiquement. Comment progresser si on est souvent blessé ?

Il est raisonnable et même indispensable de faire un choix pour ne proposer que les techniques et les méthodes d’entraînement qui répondent à deux critères : efficacité et sécurité. On les distingue avec l’expérience, un peu de bon sens et…de la conscience professionnelle !

La conscience professionnelle c’est aussi se maintenir en forme physique pour avoir valeur d’exemple. Sur le plan technique, elle dicte la poursuite du perfectionnement personnel, des recherches, non pas pour inventer des techniques, mais pour proposer des enchaînements, des variantes, sur les bases solides livrées par nos professeurs, sans jamais renier les fondamentaux qui y sont attachés.

Dans le domaine pédagogique, ne jamais oublier que ce qui est important ce n’est pas ce que nous démontrons, mais ce que les élèves retiennent. C’est se remettre en question, s’adapter au niveau des étudiants, et de leurs aspirations. Etre capable de s’adapter rapidement avec une pédagogie d’instinct et de terrain, mais aussi avec des méthodes d’apprentissage et des formules qui marquent.

Enfin sur le plan mental, la conscience professionnelle (la conscience tout court), c’est de rester fidèle à ses engagements et à ses convictions. Certes, on peut évoluer, sans pour autant confondre évolution et reniement. Les sirènes de la mode sont puissantes, mais un esprit fort est capable d’y résister.

La conscience professionnelle du professeur c’est aussi ne pas oublier la transmission de valeurs telles que le goût de l’effort, de la rigueur, et du respect des règles du dojo. Ces règles auront un effet sur la vie en société. Les séances doivent se dérouler dans un climat de convivialité et d’entraide et sûrement pas dans une ambiance où suinte la violence. Le professeur n’est pas qu’un passeur de techniques, il est bien plus que ça. Sa conscience professionnelle ne doit cesser de le lui rappeler.

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Ju-jitsu, un rappel utile

Un rappel n’est jamais inutile.

le ju-jitsu, petite fiche technique et la rentrée…

Le ju-jitsu se compose de techniques de coups (atemi-waza), de projections (nage-waza) et de contrôles (katame-waza).

Ses principes de base sont la non opposition et l’utilisation de la force de l’adversaire ; de façon directe ou en utilisant  le principe d’action réaction.

L’utilisation des coups (atemi-waza) aura pour principal objectif de déséquilibrer.

Pour projeter un adversaire (nage-waza) on utilise différents mécanismes. La bascule au-dessus du centre de gravité, la suppression d’un point d’appui ou empêcher l’adversaire de reprendre l’équilibre sur l’avant  ou sur l’arrière, et quelques autres. Comme indiqué plus haut, le déséquilibre nécessaire pourra aussi est provoqué par un coup.

Les contrôles (katame-waza) ont une importance majeure dans la mesure où ils permettent de maîtriser quelqu’un sans forcément mettre ses jours en danger.

En ju-jitsu toutes les défenses sur toutes les situations d’attaque sont étudiées, debout mais aussi au sol.

On apprend à riposter sur des agressions à mains nues ou bien armées.

Des situations de défense contre plusieurs adversaires sont prises en considération.

Pour bien pratiquer le ju-jitsu, il est indispensable de maîtriser les « ukemis », les brise-chutes. Sur l’arrière et sur l’avant. C’est incontournable lors des répétitions, mais également conseillé afin de limiter les dégâts lors d’une perte d’équilibre dans la rue, sur de la glace par exemple.

Le ju-jitsu est une méthode de self défense très efficace, pour peu qu’on la pratique de façon régulière, mais c’est aussi  une « école de vie ». Elle apporte un bien être physique et mental et contribue à une meilleure vie en société.

L’apprentissage des techniques de combat doit avoir comme objectif de ne jamais avoir à s’en servir, sauf cas de force majeure. De plus, dans la pratique, le but est éducatif et non destructif, nous ne sommes pas dans un dojo pour nous faire mal, mais pour apprendre à ne pas nous faire mal.

Concernant le ju-jitsu, il existe beaucoup d’écoles et de styles, celui que je pratique et enseigne est à but non compétitif, de façon à ce qu’il conserve son aspect traditionnel et l’ensemble des ces techniques originelles.

En effet, la compétition impose un règlement et la suppression de certaines techniques jugées, à juste titre, trop dangereuses. De fait, c’est une partie de l’efficacité qui est confisquée.

Quelle que soit la discipline que vous pratiquez, je vous souhaite une bonne rentrée.

Encore quelques mots pour clore cet article en insistant sur le fait que lorsqu’on inscrit en septembre dans un dojo, il faut se faire la promesse d’aller jusqu’au bout de la saison, et bien plus encore.

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Rediffusion

La prochaine saison approche, ce qui n’empêche pas, en cette fin d’été, la rediffusion de l’article qui a remporté le plus de succès durant la saison écoulée (publié en mai). Il s’agit de « l’attitude au dojo ». Comme quoi tout n’est pas perdu, ce qui permet d’attaquer sereinement la rentrée.

Attitude au dojo

De temps en temps il n’est pas inutile de revenir et de rappeler que le dojo est un lieu d’étude dans lequel certaines règles doivent être respectées, pour le bien être de tous.

Pour une vie en société en bonne harmonie, loin des incivilités et de cette violence qui ne cessent de gangrener notre société.

Tout d’abord, l’hygiène. Les tenues doivent être propres, les corps aussi, cela semble être la moindre des choses, mais parfois…Les ongles sont coupés courts. On ne doit pas marcher pieds nus en dehors du tatami. N’oublions pas que lors du travail au sol, nous sommes très près…du sol !

Ensuite la politesse. On doit saluer le tatami avant d’y monter et – normalement – le dojo en y entrant. Il en est de même avec les partenaires successifs, avant et après chaque échange. Qui plus est dans une tenue correcte et ne pas se contenter d’un vague mouvement de la tête. On ne retire pas sa veste de judogi sur le tatami.
On devra être ponctuel, sauf cas de force majeure et/ou impératif professionnel. Dans ce cas on informe le professeur. Si on est en retard, on attend sur le bord du tatami un signal de celui-ci avant d’y monter. Lorsqu’on doit le quitter, on l’informe également.

On évite de parler trop fort, on communique discrètement avec son partenaire et bien évidement on ne s’exprime pas pendant les explications du professeur.  On peut se désaltérer pendant le cours, juste après une explication du professeur, par exemple.

L’entraide mutuelle est sacrée, les plus anciens aident les moins anciens. On doit se souvenir que l’on a tous été débutant. Et dés la deuxième séance, on en connait un peu plus que celui qui en est à sa première, on peut déjà lui donner quelques conseils.

Enfin, on est attentif aux informations données par le professeur. Notamment lorsqu’il signifie, à l’aide du « maté », la fin d’un randori. C’est une question de respect des consignes, du partenaire, mais aussi de sécurité.

Toutes ces recommandations ont pour unique but que se déroulent les cours dans une parfaite harmonie. La recherche de l’acquisition et du perfectionnement technique ainsi que l’engagement physique doivent se dérouler dans la convivialité. Aucune violence ne doit être tolérée. Combattre la brutalité que certains portent en eux sera un objectif à court terme.

Il ne s’agit pas d’être un « Père Fouettard », mais simplement d’assumer son rôle d’éducateur. Avec un minimum de rigueur, cette rigueur qui impose des efforts, qui fait qu’on ne fait pas n’importe quoi, n’importe comment, et qui  permet un mieux vivre en société et donc de pratiquer, de progresser et de se défouler physiquement et mentalement, tout en s’amusant : nous sommes également dans le loisir.

En toute chose, il faut chercher le bon équilibre. Une discipline de fer ne fera que rebuter, à l’inverse le laxisme sera contreproductif et dangereux, encore davantage dans nos disciplines.

C’est au professeur que revient la responsabilité de diffuser ces consignes et recommandations (et de les faire respecter).

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Non opposition

Au cœur de l’été, cédons aux rediffusions. Cependant ce n’est jamais inutile de mettre en avant quelques principes de base de notre discipline ; la non opposition en est un.

« Surmonter l’habitude d’employer la force contre la force est une des choses les plus difficiles de l’entraînement du judo (et du ju-jitsu). On ne peut espérer progresser sans y parvenir ». Jigoro Kano

Il serait dommage d’oublier que la non opposition est « le principe de base » du ju-jitsu, notamment celui de l’École traditionnelle Yoshin Ryu (Ecole du cœur de saule), l’une de celles qui avait largement inspiré Jigoro Kano lorsqu’il a souhaité « ressusciter » notre art martial. Malheureusement, parfois on a tendance à l’oublier.

Avec la non-opposition, nous sommes en présence d’un principe d’une grande intelligence. Il mériterait de ne pas être utilisé que dans les affrontements physiques, mais aussi au quotidien.

L’opposition frontale ne peut donner raison qu’au plus fort physiquement et dans la société elle ne débouche jamais sur un accord constructif. N’allons pas jusqu’à mettre en avant le dicton populaire suivant : « il vaut mieux céder à l’âne que le tuer », mais on peut s’en inspirer.

Plusieurs principes sont attachés au ju-jitsu, mais celui de non opposition régit les autres : addition de forces, utilisation de celle de l’adversaire, action réaction, etc.

Ces principes ne sont applicables qu’en association avec celui de non opposition.

Il s’agit tout simplement de se retirer de la trajectoire d’une force qui avance sur nous.

Ensuite, première possibilité, sans s’en occuper davantage, la laisser s’éteindre dans le vide.

Autre possibilité (si l’on veut maîtriser celui qui attaque), celle qui consiste à conduire la force en question, en y ajoutant la nôtre ; ce sont les principes d’utilisation de la force de l’adversaire et de l’addition des forces.

On peut aussi y ajouter simultanément un obstacle, au niveau des jambes de l’attaquant, par exemple, afin de le faire chuter. Cette dernière description, sommaire j’en conviens, pourra servir de première explication pour une technique comme hiza-guruma. Autre exemple avec tomoe-nage où on sacrifie son corps au détriment de celui qui attaque. Comme le démontre la  figurine qui illustre cet article. Figurine réalisée en son temps par mon père, Bernard Pariset.

Ce principe général de non opposition n’est en aucun cas un signe de renoncement, mais tout simplement l’incarnation du bon sens.

Force contre force, c’est forcément…le plus fort qui gagne. Et puis, utiliser la force de l’adversaire en commençant par ne pas s’y opposer, c’est aussi un moyen de ne pas gâcher sa propre énergie.

Cette non opposition, comme indiqué en introduction de cet article, est également utile dans les rapports humains, c’est ce que prônait Jigoro Kano, lorsqu’il disait : « Le conflit se fait au détriment de tous, tandis que l’harmonie se fait au bénéfice de chacun ».

Avec un peu d’entraînement, ce principe qui permet de vaincre la force brutale donne la possibilité à tous de ne pas subir la loi du plus fort est, de mon point de vue, sans jeu de mot, la principale force du ju-jitsu.

Terminons cet article avec une dernière citation : «Qui apprend à céder est maître de la force ». Lao Tseu.

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Tel armurier, telle arme

Comme la semaine dernière,  c’est une belle petite histoire issue du savoureux livre « contes et récits des arts martiaux de Chine et du Japon » que je (re)propose aujourd’hui en guise d’article. Dans celle qui suit, il est question de l’esprit (le shin). L’aboutissement de notre travail semble, en effet, être le reflet de notre âme. Que cette lecture, au cœur de l’été,  entraîne une réflexion positive.

« Le sabre est l’âme du samouraï », nous dit l’une des plus vieilles maximes du Bushido, la Voie du guerrier. Symbole de virilité, de loyauté et de courage, le sabre est l’arme favorite du samouraï. Mais dans la tradition japonaise, le sabre est plus qu’un instrument redoutable, plus qu’un symbole philosophique : c’est une arme magique. Il peut être maléfique ou bénéfique selon la personnalité du forgeron et du propriétaire. Le sabre est comme le prolongement de ceux qui le manient, il s’imprègne mystérieusement des vibrations qui émanent de leur être. Les anciens Japonais, inspirés par l’antique religion Shinto, ne conçoivent la fabrication du sabre que comme un travail alchimique où l’harmonie intérieure du forgeron est plus importante que ses capacités techniques. Avant de forger une lame, le maître armurier passait plusieurs jours à méditer, puis il se purifiait en procédant à des ablutions d’eau froide. Revêtant des vêtements blancs, il se mettait alors au travail, dans les meilleures conditions intérieures pour donner naissance à une arme de qualité. Masamune et Marasama étaient d’habiles armuriers, qui vivaient au début du XIVe siècle. Tous deux fabriquaient des sabres d’une très grande qualité. Murasama, au caractère violent, était un personnage taciturne et violent. Il avait la sinistre réputation de forger des lames redoutables qui poussaient leurs propriétaires à de sanglants combats ou qui, parfois, blessaient ceux qui les manipulaient. Ces armes, assoiffées de sang, furent rapidement tenues pour maléfiques. Par contre, Masamune était un forgeron d’une très grande sérénité qui se livrait à un rituel de purification pour forger ses lames. Elles sont considérées aujourd’hui comme les meilleures du pays. Un homme, qui voulait tester la différence de qualité entre les modes de fabrication des deux armuriers, plaça un sabre de Marasama dans un cours d’eau. Chaque feuille dérivant à la surface, qui touchait la lame, fut coupée en deux. Ensuite, un sabre fabriqué par Masamune fut placé dans le cours d’eau. Les feuilles semblaient éviter la lame. Aucune d’elles ne fut coupée, elles glissaient toutes, intactes, le long du tranchant comme si celui-ci voulait les épargner. L’homme rendit alors son verdict : « La Murasama est terrible, la Masamune est humaine »

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