Réflexions sur le ne-waza, le travail au sol

La période estivale n’empêche pas quelques réflexions, surtout sur un sujet comme le travail au sol (le ne waza). Un domaine efficace, formateur et amusant.

En matière de self défense, si on peut éviter d’aller au sol, c’est préférable. D’abord pour éviter de « salir le costume », ensuite parce qu’on risque de se trouver sur un revêtement moins confortable que celui d’un tatami et enfin, dans ce cas, il est préférable qu’il n’y ait pas plusieurs adversaires.

Donc, si on s’y retrouve, c’est souvent contraint et forcé.  Mais parfois on choisit d’y aller pour contrôler l’adversaire sans le blesser gravement, question de responsabilité !  Lorsqu’un éducateur doit maîtriser un adolescent « en difficulté »,  ou encore quand ça dégénère dans des foyers où règne une certaine violence.

D’autres situations existent et dans lesquelles l’extermination n’est pas l’option.

Et puis, il y a un contexte qui se passe principalement au sol : la tentative de viol.

Il est certain que dans le domaine du travail au sol, en particulier, l’efficacité demande du temps, peut-être davantage que dans les autres secteurs. Il faut étudier les techniques, les assimiler, les répéter et les pratiquer dans des formes d’opposition codifiées avec des exercices à thème. Il faut du temps pour « modeler » le corps, le rendre à la fois souple et tonique et capable de se mouvoir dans des positions qui ne sont pas forcément naturelles ; lui donner une « forme de corps ».

Il est donc nécessaire d’être  motivé. Motivé par le besoin d’apprendre à se défendre, mais aussi en trouvant d’autres intérêts, comme l’expression corporelle, le renforcement de qualités physiques et mentales. Enfin, avec un aspect ludique qui ne gâche rien, bien au contraire. Quand on peut rassembler l’utilitaire, le développement physique et le bien être mental, on rassemble les éléments qui nous donnent un « mental d’acier ».

Comme indiqué plus haut, il ne faut pas négliger l’aspect ludique que l’on trouvera dans le ne-waza, lorsqu’il est pratiqué avec un bon état d’esprit. On peut s’exprimer, s’investir totalement tout en s’amusant, ce qui n’a rien de contradictoire avec l’efficacité, je pense même que c’est un atout supplémentaire pour une pratique assidue. Loin des pratiques brutales qui exacerbent la violence, qui blessent souvent et qui ne satisfont que les brutes. Je maintiens que l’on peut être efficace sans en être une (de brute).

Comme dans tous les domaines, il peut exister des prédispositions, mais rien ne remplacera l’entraînement. On en revient toujours aux mêmes qualités : volonté, régularité, persévérance.  « On ne peut rien contre l’entraînement » !

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Utilité de la beauté du geste

Lecture d’été.

Voilà un conseil de lecture approprié en ce milieu d’été et au moment où les Jeux Olympiques battent leur plein. L’auteur Thierry Grillet propose « Petit traité du geste, pour la beauté du sport ». Ci-dessous, la quatrième de couverture.

« En cette année olympique, cet essai entre dans le sport par le « geste ». Depuis la sculpture antique du Discobole, on n’a cessé de célébrer le geste, brique première des disciplines sportives. Il fascine, émeut et inspire. Ce petit traité en propose une lecture, qui révèle, au-delà de la performance physique, sa beauté et sa charge culturelle.

Prenant appui sur des performances mythiques de champions – le service de Federer, la paneka de Zidane, le « tir » à l’arc d’un maître de kyudo, le saut révolutionnaire « cool » de Fosbury, etc. -, l’auteur puise dans l’histoire de huit disciplines sportives mais aussi dans celle des arts et des idées, et bâtit ainsi une « petite mythologie du geste », invitant le lecteur à percer aux côtés de sociologues, d’artistes,  de scientifiques, le mystère du geste parfait. »

Personnellement, j’appartiens pleinement à la catégorie de ceux qui défendent cette thèse, celle qui consiste à ne pas opposer l’efficacité à la beauté du geste, bien au contraire, y compris dans les disciplines de combat. Chacun peut et doit tenter l’effort de conjuguer beauté du geste et efficacité, ce qui aboutit au « geste parfait ». Celui qui semble le plus naturel dans son exécution, en devenant une seconde nature après des sommes de répétions.

Lorsqu’une performance sportive est spectaculaire, elle est encore plus  appréciée du public.

Maintenant, on peut argumenter, avec raison, que dans les méthodes de self défense et en cas de survie, on se moque de la beauté du geste. Mais, à moins d’être un soldat en guerre, on ne sauve pas sa vie tous les jours et à l’entraînement les efforts pour aboutir au geste parfait, alliant efficacité et esthétisme, ne gâcheront rien.

On peut aussi utiliser le mot d’élégance. L’élégance technique et physique, mais aussi  l’élégance comportementale, dans la victoire, dans la défaite et dans la vie de tous les jours.

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Essayiste, Thierry Grillet a publié plusieurs ouvrages consacrés à l’art et au cinéma. Longtemps maître de conférences à l’Institut d’études politiques de Paris, il a aussi dirigé le département culturel de la BNF. Il est commissaire de l’exposition « Le sport, pour la beauté du geste qui s’ouvre début 2024 aux Franciscaines à Deauville.

Cinq bonnes raisons d’aimer ce métier

tai-otoshiSur ce blog, le 5 juillet dernier dans un article intitulé « ce qui se conçoit bien… » j’évoquais les devoirs et les obligations attachés au métier de professeur. Dans ce prolongement, et à l’approche d’une nouvelle saison (les enseignants doivent être impatients de revêtir leur tenue préférée), il me semble naturel d’évoquer aujourd’hui les satisfactions offertes par cette noble mission, elle sont autant de bonnes raisons de l’aimer.

Pour ma part, j’en vois essentiellement cinq.

La première concerne tout simplement le plaisir de transmettre un savoir et des connaissances à propos d’une discipline, d’une matière ou encore à propos d’un art que l’on aime. Si tel n’est pas le cas, mieux vaut faire autre chose.

Deuxièmement, notamment dans les arts martiaux, il y a la satisfaction de voir les élèves progresser. Amener un débutant jusqu’à la ceinture noire en procure une très belle. Surtout si au départ ce n’était pas gagné ! (Certains reconnaitront une forme d’humour très personnel, et certains aussi se reconnaitront peut-être.) La ceinture noire et les dan qui lui succèdent ne sont pas les seules preuves de progrès, même si elles en sont des probantes.

Troisièmement, il s’agit de la reconnaissance et du respect qui nous viennent en retour, si nous avons été la hauteur de notre mission. Même si parfois certaines exceptions confirment la règle.

Quatrièmement, se sentir utile, même à l’extérieur du dojo. Si un élève vous confie que sa vie s’est améliorée au fur et à mesure de sa pratique, vous ne pouvez que ressentir un contentement indéniable, sans doute supérieur à celui donné par l’obtention d’un grade ou bien d’un quelconque titre sportif. Là aussi, il s’agit d’un l’enseignement dispensé sur du long terme.

Enfin la cinquième, qui se situe dans le prolongement de la précédente, et qui n’est pas la moindre, consiste à participer à l’amélioration de la vie en société. Dans le domaine qui concerne les arts martiaux, si au travers d’une pratique qui respecte les principes du shin-ghi-tai (l’esprit, la technique et le corps), chers à JIgoro Kano, nous pouvons, grâce à un enseignement qui ne néglige aucun aspect, participer au combat contre cette violence qui gangrène notre quotidien, il s’agira là encore d’une inestimable satisfaction.

Voilà cinq bonnes raisons qui me font aimer ce métier. Peut-être d’autres enseignants en trouveront des différentes et/ou complémentaires.

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