Les katas

Cette semaine on revient sur les katas.

Il n’est pas inutile d’insister sur tout ce que représentent les katas. Souvent, ils ne sont abordés que lorsque se profile à l’horizon un passage de grade. Ils sont bien davantage que ça.

On traduit kata par le mot « forme ». Pour plus de clarté on peut ajouter « imposée ».

Ils sont des moyens d’apprentissage, des méthodes d’entraînement, ils permettent la codification, la transmission et même la sauvegarde des techniques et des principes de bases. Ils sont les garants de nos traditions.

Malheureusement, considérés parfois comme des  « passages obligés » pour accéder au grade supérieur, ils ne sont abordés que dans cette optique ! Qu’ils intègrent un ensemble de contenus techniques d’évaluation, cela semble juste, mais leur utilité est plus importante que cela, heureusement.

Les katas permettent de rassembler les techniques par famille et/ou par thème et de leur faire traverser les âges, ce sont aussi de formidables méthodes d’entraînement.  En effet, ils représentent souvent un combat (le goshin-jitsu-no-kata notamment), certes un combat codifié pour des raisons évidentes de sécurité, mais il s’agit bien du reflet d’un affrontement ;  en conséquence, les attaques d’Uke doivent être sincères et fortes de façon à ce que les ripostes de Tori le soient tout autant, mais aussi qu’elles soient  réalistes et donc efficaces.

Pour les judokas, certains katas sont aussi l’occasion d’étudier des techniques « oubliées »,  interdites en compétition.

Le kata est également un exercice de style, certaines attitudes doivent être respectées. C’est le « plus » des arts martiaux. Un « plus » qui devient de plus en plus indispensable à conserver pour se démarquer des pratiques vides de valeurs éducatives.

Ils sont aussi, tout simplement, une addition de techniques intéressantes à pratiquer une par une. Il n’est pas nécessaire d’attendre un prochain examen pour commencer à les étudier.

Lors de l’exécution d’un kata, à l’occasion d’un examen, l’évaluation doit se faire, avant tout, sur l’efficacité des ripostes de Tori, qui répondent aux attaques d’Uke dont la sincérité doit être incontestable.

Ensuite, puisqu’il s’agit de formes imposées, il faut bien évidemment respecter l’ordre des techniques, les déplacements et les emplacements. Enfin il faudra être attentif à l’attitude générale dans laquelle doivent être exclus désinvolture et relâchement corporel.

Cependant, un problème et un mystère demeurent et entourent les katas : il s’agit de ces incessantes modifications dont ils sont les victimes de la part des organismes « officiels ». Cela a pour effet de décourager les élèves, de désorienter les professeurs et le jury, allant jusqu’à discréditer ces exercices.

Pour faire apprécier le kata, il suffit simplement de le présenter comme une partie intégrante de la pratique  et non pas comme un passage imposé pour l’accession à un grade supérieur.

Enfin, dans la formation des juges, il est indispensable de hiérarchiser les critères de jugement. Certaines fautes sont rédhibitoires : celles qui touchent à l’efficacité (comme déjà indiqué plus haut) , d’autres pas, d’où la nécessité que les jurys soient formés pour nuancer leurs appréciations, en fonction de différents paramètres : âge, grade postulé, etc.

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Efficacité, Education, Ethique, Evolution et Esthétisme

webkanjiCes cinq mots commençant par la même lettre, résument ma conception du ju-jitsu. Celle-ci m’a guidé tout au long de mon parcours.

Efficacité. Cela semble évident pour une discipline de combat. Avec le ju-jitsu toutes les formes d’attaques sont envisagées et en matière de ripostes aucun secteur n’est négligé : travail à distance, en corps à corps, debout et au sol !

Education. Une méthode d’éducation physique et mentale, la grande idée et le grand principe qui ont été développés par Jigoro Kano. Elever l’art martial au-dessus d’une simple forme de combat, à savoir vers une Ecole de vie, un idéal de comportement. Développer son corps, l’assouplir, parfaire sa condition physique, tous ces éléments seront garants d’une bonne santé et ne nuiront pas à l’efficacité, il s’agit là de l’aspect physique. Ensuite, l’éducation mentale Dans un premier temps celle-ci se construira naturellement, au travers d’une pratique encadrée où s’imposera le respect des règles de vie d’un dojo. Comme celles concernant la politesse, l’entraide et celles liées aux traditions ; le salut et la tenue, etc. Ensuite, et c’est essentiel, une pratique non violente et sécuritaire. Une des idées géniales de Kano avait été de faire le tri dans les techniques pour ne conserver que celles qui répondaient à deux critères : efficacité et sécurité. (Dommage de constater parfois des retours en arrière) Ensuite il faudra apprendre à faire la nuance entre partenaire et adversaire, respecter les deux et ménager son propre corps, pour se garantir une pratique durable ; apprendre à contrôler ses pulsions, donc à se maîtriser. Enfin, il faudra aussi renforcer son mental et développer le goût de l’effort et s’imposer de la rigueur. La plupart de ces qualités acquises dans le dojo pourront être transposées dans la vie en société.

Ethique. En liaison directe avec l’éducation, l’éthique se matérialisera par le respect des règles de morale. Le fameux code moral du judo et du ju-jitsu,

Evolution. Il s’agit là de l’évolution du pratiquant dans la mesure où il progressera. Il y a aussi l’évolution des techniques qui consiste à les affiner, à chercher de nouvelles opportunités, sans jamais trahir la forme et l’esprit. Pour les enseignants, l’évolution devra aussi se faire dans la recherche de nouvelles méthodes d’entraînement et de nouveaux outils pédagogiques.

Esthétisme. Une technique peut être belle et efficace. Elle peut être aussi inesthétique et inefficace. La beauté du geste relève du talent, sans doute, mais aussi et surtout du travail. (Le talent sans le travail n’est qu’une sale manie », Nietzsche). « Faire beau » est parfois (je dis bien parfois) contesté par deux catégories de personnes. Celles qui – dans tous domaines – critiquent systématiquement ce qu’ils ne maîtrisent pas, et souvent ils ne maîtrisent pas grand chose. Et celles intéressées uniquement par l’aspect utilitaire (dommage). Il se trouve que la discipline que j’ai la chance d’enseigner, à savoir le ju-jitsu, est un art martial et dans cette appellation il y a le mot « art ». Plusieurs définitions le définissent. En voici deux, extraites du Larousse. Art : « aptitude, habilité à faire quelque chose ». Mais aussi : « manière de faire qui manifeste un sens esthétique ». Leur association me satisfait pleinement.

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Traditions

Ne pas respecter certaines traditions dans le jujitsu dit « traditionnel » pourrait être surprenant. Or, parmi ces traditions existe le port de notre tenue appelée, par facilité, le kimono. J’avais consacré un article sur le sujet le 22 janvier dernier, donc je n’y reviendrai pas, si ce n’est pour confirmer ce qui y est écrit et enfoncer un peu plus le clou. Tant pis si ce n’est pas dans l’air du temps, mais il existe certaines habitudes et rites sur lesquels il ne me semble pas raisonnable de transiger. Sans pour autant jouer les pères fouettards, mais tout simplement en tant que « gardien du Temple », de façon à prévenir trop de dérives, surtout lorsque le curseur bascule à l’extrême en proposant une pratique avec des tenues diverses et variées, peu adaptées et parfois avec des chaussures sur un tatami. Vouloir se rapprocher de la réalité n’est pas forcément le bon argument à mettre en avant, la réalité étant la réalité, surtout si c’est pour bannir certaines règles, notamment sécuritaires et hygiéniques. Tout comme il est dommage, toujours au même titre, d’assister à des regroupements dans lesquels fleurissent également différentes tenues. J’ai moi-même pratiqué bon nombre d’arts martiaux, afin de satisfaire mon besoin de découverte, mais c’était à chaque fois dans la tenue de l’art martial en question, par principe.
Les traditions sont l’émanation du respect de règles et de dates, elles sont des points de repère. Elles imposent un devoir de mémoire et de rigueur. Pouvons-nous nous permettre de nous en passer ? Dans nos dojos, notre mission n’est-elle pas de les maintenir ?
Enfin, je pense que la tradition n’est pas dépassée ? et sans doute davantage à notre époque ? lorsqu’il s’agit de pratiquer dans des conditions entourées d’une certaine rigueur. Celle-ci favorise la concentration pour la recherche du détail et du geste précis, afin que la finesse technique prédomine, ce qui est un principe fondamental de notre art !
Site du club de ju-jitsu Eric Pariset : www.jujitsuericpariset.com