Le Golfe Bleu

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C’est davantage un récit qu’un article que je propose cette semaine. Il mérite d’être dégusté comme un fruit de saison bien mur.

Je vous propose un voyage vers le soleil et dans le temps en vous emmenant, quelques décennies plus tôt, en direction d’un lieu magique qui malheureusement n’existe plus : le Golfe Bleu.

Exactement à Beauvallon-sur-Mer, un hameau, juste à côté de Sainte-Maxime et en face de Saint-Tropez.

À l’initiative de Gérard et Armande Néél, couple de professeurs de judo au fort tempérament, fut ouvert dans les années 1950, à 300 mètres de la mer, au milieu d’une forêt de mimosas, de chênes lièges et de pins parasols, un centre de vacances un peu sur le modèle du « Club Med ».

Le  couple avait comme projet de rassembler durant l’été des judokas et leurs familles pour des périodes d’une semaine ou plus. Le centre fonctionnant du 15 juin au 30 septembre. Au début, l’hébergement – quelque peu spartiate – se faisait dans des paillottes avec de la terre battue comme revêtement de sol ! Un tatami, protégé par un toit, mais ouvert sur les côtés, se trouvait au centre du village de vacances.

Deux heures de techniques tous les matins et… deux heures de randoris toutes les fins d’après-midi, tel était le programme pour les stagiaires. Pour encadrer tout cela, ce sont les meilleurs champions qui sont passés par ce lieu, jusqu’à la fermeture du centre à la fin des années 1980 !

Mais ce sont les débuts de l’aventure qui sont assez fascinants et qui me laissent tant de souvenirs. En effet, mon père faisait partie de l’encadrement des premières années, avec bien sûr son « alter égo » Henri Courtine et le fameux géant néerlandais (un pléonasme) Anton Geesink.

Le centre recevait des  judokas de toute l’Europe, et même de plus loin. Souvent des équipes nationales venaient préparer les saisons suivantes. Dans ce lieu unique  une ceinture jaune pouvait faire le combat de sa vie avec un Champion du monde.

Pour ma part et à l’âge qui était le mien, il ne s’agissait pas d’entraînement, mais tout simplement d’un endroit, ou pendant une petite dizaine d’années, j’ai vécu, de juin à septembre (à l’époque la rentrée des classes se faisait vers le 21 septembre) des vacances que je peux classer parmi les plus beaux moments de ma vie. Elles m’ont permis d’assister à des combats d’entraînements d’anthologie, de côtoyer les sommités du judo et des arts martiaux, de créer des amitiés indéfectibles et de faire de cette région ma région de cœur.

Aujourd’hui, un célèbre promoteur a mis fin à la colline magique. Seul rescapé, le restaurant plage « Le Pingouin bleu », tenu par Pierrot, le fils de la famille. Si un jour vous passez par là, n’hésitez pas, vous serez bien accueillis et vous serez à quelques pas d’un lieu chargé d’une histoire comme on n’en connaîtra plus !

J’ai pensé ajouter à ce récit quelques lignes en rapport avec la carte postale qui l’illustre, mais aussi une description de ce qui faisait nos journées.

Toutes les prises de vue de cette carte qui date de 1974 font remonter de très forts souvenirs, mais il y en a une qui me marque particulièrement (en dehors d’Anton Geesink, hors catégorie), c’est celle qui se trouve en haut et à gauche. Elle représente le chemin qui descendait à la plage.

Avec mon amie d’enfance Katy, la fille d’Henri Courtine, accompagnés de nos mères, nous allions tous les matins sur cette petite plage qui appartenait au camp de vacances. Nos pères étaient sur les tatamis pour dispenser leurs techniques.

Après beaucoup de temps passé dans l’eau, nous remontions vers les 13 h 00. Il fallait d’abord traverser la route qui longe le littoral, la nationale 98, ou bien emprunter un souterrain plus prudent mais assez sinistre. Nous commencions alors à gravir le chemin qui nous menait au centre. La première partie se déroulait sous un soleil de plomb et puis d’un seul coup nous entrions dans un tunnel de mimosas. Une délicieuse ombre naturelle nous délivrait d’une chaleur accablante. Seuls les végétaux peuvent  procurer un tel bien-être.

Avant de rejoindre la « salle à manger » installée sous des platanes centenaires qui nous abritaient eux aussi  de l’astre solaire, nous passions par le bloc sanitaire pour un efficace dessalage.

L’après midi, après l’indispensable sieste, nous ne retournions pas à la plage. Les judokas suaient sang et eau dans leurs judogis, les compagnes assistaient bien souvent aux exploits de leurs moitiés, assises sur les bancs qui entouraient le dojo de plein air. Je précise qu’à l’époque, très peu de femmes pratiquaient le judo, c’est pour cette raison que j’emploi le mot compagne et non pas compagnon.

Quant à nous, les plus jeunes, nous nous retrouvions pour nous livrer à différentes activités. Les enfants savent toujours s’occuper lorsqu’ils sont ensembles, même sans écran, Dieu merci.

Après l’entraînement, nous nous retrouvions tous pour le dîner, et juste un peu avant la fin du repas, avec la permission des parents, il y avait un grand moment que nous attendions tous, nous les enfants,  c’était lorsque nous investissions le tatami, jusqu’à ce que nos parents qui finissaient la soirée au bar viennent nous arracher à ce lieu transformé en véritable cours de récréation.

Le dimanche, le judo faisait une pause. Bien souvent pour se reposer et surtout pour chercher et trouver un peu de fraîcheur, nous montions dans l’arrière pays, pique-niquer au pied d’un magnifique village, qui à l’époque était abandonné : Bargème. Je me souviens qu’en ce temps un petit ruisseau qui descendait de la montagne nous permettait de mettre les melons au frais. Voilà le genre d’image dont je me souviens avec une précision hallucinante. Ce n’est pas la seule,  on n’échappe pas à son enfance.

Avant de redescendre dans la fournaise, s’imposait une halte à Bargemon, autre village typique du Haut Var, pour un dîner où la charcuterie régionale et les écrevisses faisaient bon ménage dans les assiettes. Le retour était un peu laborieux dans la mesure où pour rejoindre Beauvallon, la route n’était absolument pas celle qui existe maintenant. Traverser ce qu’on appelle le « Gratteloup », qui appartient au magnifique Massif des Maures, relevait presque de l’exploit, surtout de nuit. Entre Le Muy (ceux qui se rendent dans le golfe de Saint-Tropez connaissent bien ce nom, puisque c’est là que se situe la sortie de l’autoroute) et la côte il fallait une heure et demi, alors que trente minutes suffisent maintenant. Les virages qui étaient la cause de ce trajet sans fin représentaient parfois une véritable épreuve pour nos estomacs. Après une nuit, quelques fois en compagnie de « nos amis » les moustiques, nous étions prêts pour une nouvelle semaine de vacances inoubliables.

Les réactions suscitées lors de l’évocation du Golfe Bleu lors de précédentes parutions me font penser que je ne suis pas le seul à me souvenir de ce lieu enchanteur.

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Les anciens

Anciens, séniors, vétérans, vieux, vieillards, ancêtres, etc. Voilà un échantillon de noms, plus ou moins agréables, qui désignent le troisième âge et même, maintenant le quatrième !

Ayant intégré une décennie qui me place largement dans une des ces catégories, j’ai pensé livrer quelques réflexions sur le sujet.

Vieillir, comme disait Jean d’Ormesson, c’est encore la meilleure façon de ne pas mourir. Cette expression mise à part, il existe quelques avantages à prendre de l’âge, mais en toute objectivité ils sont moins nombreux que les désagréments.

Cet article se voulant positif, c’est la mise en avant des « privilèges » qui sera favorisée. Ils sont connus, sans doute n’est-il pas inutile de les rappeler.

Ce n’est pas toujours évident de vieillir, alors autant bien le faire. Pour cela il faut bénéficier avant tout d’une bonne santé. Cette santé qui est le fruit de différents facteurs : la génétique, l’entretien physique, l’hygiène de vie et… la chance. Mais aussi l’environnement  et un certain confort qui offre des soins, une vie sociale et familiale digne de ce nom. Vieillir dans la solitude et la précarité ne devait pas exister.

Donc, revenons aux quelques avantages que doit (ou devrait) apporter l’avancée en âge : l’expérience, la connaissance, la sagesse, la tolérance, la relativisation et sans doute quelques autres. Toutes ces qualités mériteront un prochain article.

Dans nos disciplines, ceux qu’on appelle affectueusement « les anciens » sont, pour certains, des puits de science. Ils doivent être respectés. Pas uniquement ceux-là, mais tous ceux qui ont fait preuve d’un engagement et d’une fidélité totale à leur discipline.

Ni vénération, ni idolâtrie, simplement de la considération pour un parcours et pour une personne qui forcement a un chemin plus important. Un « ancien » est par définition… plus ancien, il a forcément des choses à apprendre aux plus jeunes. Surtout quand ils ont été professeurs ; se souvenir de ce que l’enseignant a apporté, que sans lui, on ne serait peut-être pas le pratiquant que l’on est devenu. Malheureusement, parfois, l’ingratitude n’est pas qu’un mot.

Même si le physique n’est plus tout à fait le même, la connaissance technique ne s’altère pas et encore moins l’esprit ; c’est aussi ce que voulait mettre en avant Jigoro Kano avec le « shin gi tai ». C’est l’occasion de rappeler que les grades ne sont pas que le reflet des aptitudes physiques, ni des connaissances techniques, mais aussi et surtout celui de la durée d’un engagement.

Une société qui ne respecterait plus « ses anciens » n’aurait sans doute que peu d’avenir.

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Premiers pas en ju-jitsu

Cette semaine, c’est une fiche technique très simple sur le ju-jitsu que je propose en guise d’article.

Pour les plus anciens, il est toujours utile de se rafraîchir la mémoire. Pour les néophytes, il est encore plus important de s’informer.

Le ju-jitsu se compose de techniques de coups (atemi-waza), de projections (nage-waza) et de contrôles (katame-waza).

Ses principes de base sont la non opposition et l’utilisation de la force de l’adversaire ; de façon directe ou en utilisant le principe d’action réaction.

L’atemi-waza, le travail des coups, aura davantage pour objectif de déséquilibrer que d’être une finalité.

Pour projeter un adversaire on utilise plusieurs mécanismes. La bascule au-dessus du centre de gravité, la suppression d’un point d’appui,  empêcher l’adversaire de reprendre l’équilibre sur l’avant. Et tout simplement en utilisant la force de l’adversaire.

Les contrôles (katame-waza) ont une importance majeure dans la mesure où ils permettent de maîtriser quelqu’un sans forcément mettre ses jours en danger.

En ju-jitsu toutes les défenses sur toutes les situations d’attaque sont étudiées,  debout et au sol, à mains nues ou bien armées.

On travaille également sur des situations de défense contre plusieurs adversaires.

Pour bien pratiquer le ju-jitsu il est indispensable de maîtriser les « ukemis » les brises chutes. Sur l’arrière et sur l’avant. C’est indispensable lors des répétitions, mais également dans la rue lorsque l’on dérape sur un sol glissant, ou bien que l’on « s’emmêle les crayons ».

Il existe beaucoup d’écoles et de styles de ju-jitsu, celui que je pratique et enseigne est à but non compétitif, de façon à ce qu’il conserve son aspect traditionnel et l’ensemble des ses techniques originelles.

En effet, la compétition impose (à juste titre) un règlement qui sclérose quelque peu la discipline. Si certaines combinaisons et techniques sont retirées, c’est qu’elles sont dangereuses. De fait, cela signifie qu’elles sont efficaces en self défense ; c’est dommage de ne plus les étudier. Maintenant chacun opte pour ses préférences, il ne s’agit que d’un point de vue renforcé par une longue expérience.

Le ju-jitsu est une méthode de self défense efficace pour peu que le pratiquant s’y astreigne de façon régulière. C’est aussi un art martial porteur de fortes valeurs éducatives, c’est également et tout simplement un « art de vivre » qui apporte un bien être physique et mental.

Cet ensemble ne manque pas de contribuer à une meilleure vie en société. D’autant que l’appartenance à une « famille », comme celle des arts martiaux impose (normalement) le respect des consignes élaborées par cette famille.

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Le « kimono »

Le kimono passerait de mode, victime de l’émergence de nouvelles pratiques plus tendances et qui rangeraient le célèbre vêtement dans l’armoire aux souvenirs.
D’une nature tolérante, et de plus en plus d’ailleurs, l’âge participant à l’assouplissement de l’esprit, je n’ai rien contre l’émergence d’autres disciplines, pourvu que l’on me laisse la possibilité de m’interroger quant à savoir s’il s’agit vraiment, pour certaines, d’une évolution. Chacun doit trouver celle qui lui convient et dans laquelle il va pouvoir s’exprimer. Mais je reste un infatigable défenseur d’une pratique éducative au respect sans faille de l’intégrité physique. Je ne fais pas non plus d’amalgame, les nouvelles formes de travail ne sont pas toutes dangereuses.
L’objet de ce billet est avant tout de prendre la défense de ce vêtement emblématique appelé par facilité de langage le kimono, alors qu’il serait plus correct de le nommer judogi, karatégi, kékogi et pourquoi pas jujitsugi.
Il est devenu une tradition au fil des années et il a toutes les raisons d’exister et aucune de disparaître.
Il propose une solidité à toute épreuve. Capable de subir les traitements les plus redoutables.
Son uniformité impose une certaine neutralité dans la pratique et met d’emblée tout le monde sur un même pied d’égalité. Il masque quelque peu les différences physiques. Pas de privilège pour les « mieux bâtis ».
L’aspect hygiène est pris en considération puisqu’il est capable d’absorber des milliers de litres de sueur inévitablement dépensés et de plus, il facilite une proximité parfois gênante et embarrassante pour certains.
Voilà pourquoi je suis résolument pour cette tenue pratique, hygiénique, solide et pourfendeuse de barrières physiques et sociales. A vos « kimonos ».
Site du club de ju-jitsu Eric Pariset : www.jujitsuericpariset.com

Ponctualité bis

En mars 2012, ce blog proposait un article sur une règle de bienséance. Deux années après, il n’est peut-être pas superflu de le proposer une nouvelle fois. Il pourra être utile, d’une part à ceux qui nous ont rejoints depuis et d’autre part à ceux qui pourraient être victimes d’une mémoire défaillante. Bonne lecture ou relecture !
« Davantage qu’une simple histoire de règle “psychorigide”, il s’agit d’un principe assez basique.
La ponctualité aux cours doit être respectée, sauf s’il s’agit d’un impératif professionnel ou d’un incident matériel exceptionnel lié aux transports, par exemple.
Un cours est un ensemble composé de différentes phases. Le salut du début des cours n’en est pas des moindres.
En langage d’éducateur sportif, cela s’appelle la prise en main. Mais plus banalement, il s’agit d’une simple règle de politesse et de respect vis-à-vis des autres élèves et du professeur.
Et puis, imaginons juste un seul instant que TOUS les élèves arrivent en retard. On entrerait là dans une forme de self-service de la forme. C’est peut-être dans l’air du temps pour d’autres activités, mais je persiste à penser qu’il est bon de cultiver une certaine façon d’être. Surtout dans la mesure où celle-ci n’impose rien d’extraordinaire et ne représente pas un effort insurmontable. Et plus largement elle participe à l’harmonie et au bon déroulement de la vie en société, notre art continuera ainsi à apporter sa pierre à l’édifice. »
Site du club ju-jitsu Eric Pariset : www.jujitsuericpariset.com