Dernièrement un internaute se demandait si les professeurs de ju-jitsu testaient leurs techniques « en situation », c’est-à-dire dans la rue, pour être tout à fait précis. Cette question pourrait être posée plus largement à tous ceux qui enseignent une méthode de défense. Mais peut-être y avait-il un peu de malice dans cette interrogation ? Ceci étant, tester chaque technique dans la rue avant de l’enseigner n’est pas vraiment possible. D’abord parce que c’est interdit ; il existerait un problème de droit (et de conscience) s’il s’agissait de provoquer une telle situation.
Certes, travailler dans le confort d’un dojo et se retrouver confronté à la violence de la réalité, ce n’est pas pareil. Mais la crédibilité d’un enseignant et l’efficacité des élèves ne peuvent pas passer par la rue. Il est vrai que certaines méthodes sont plus crédibles que d’autres, mais en grande partie, cela dépend de l’enseignant, et malheureusement il y a de l’incompétence partout ! Parfois aussi une certaine forme d’abus (pour employer une formule polie), quand certains n’hésitent pas à « surfer » sur des évènements dramatiques.
Apprendre à éviter les « situations à risque » fait partie de l’éducation inhérente aux arts martiaux et plus largement à toutes les disciplines se réclamant de la self-défense. L’aspect psychologique, sur lequel certains insistent avec raison ne doit pas être à sens unique ; être préparé mentalement est préférable, mais il faut aussi mettre en garde sur toutes les conséquences d’un combat de rue. Cet aspect psychologique se renforcera par une pratique régulière, ne serait-ce que par la confiance acquise au fil du temps, ce qui est plus sain qu’un conditionnement permanent dans l’état de stress propre à une agression. Et puis, l’essentiel reste l’apprentissage technique et les nombreuses répétitions. La régularité que l’on s’imposera renforcera aussi la condition physique et les automatismes. Ces derniers étant incontournables, à fortiori pour ceux qui pensent ne pas être encore trop affutés mentalement.
Durant ma carrière, j’ai recueilli un nombre important de témoignages de la part de personnes ayant pu se sortir de mauvaises situations grâce à leur pratique, sans jamais avoir eu besoin de se tester « en situation réelle» au préalable.
Et puis, en matière d’agression, comme pour certains évènements de la vie, il existe une part d’imprévu dans laquelle la chance et des circonstances particulières peuvent jouer un rôle non négligeable. Pour illustrer cette affirmation, j’évoquerai deux exemples véridiques. Le premier met en scène un ex-champion du Monde de boxe, mis KO dans un bar par un « pochtron ». Le second un élève, pas du tout sportif et plus très jeune, qui à la sortie de sa première séance de ju-jitsu a pu se défaire d’un agresseur qui tentait de lui arracher sa sacoche, tout simplement en lui appliquant un coup de pied appris et répété une demi-heure auparavant. Comme quoi tout peut arriver, le pire comme le meilleur ! Il n’est donc pas possible de répondre avec sincérité à une question souvent posée par des néophytes : « Au bout de combien de temps, je pourrai me défendre ? ». Chacun possède en lui un potentiel défensif, plus ou moins important. Celui-ci augmentera au fur et à mesure de la pratique. Il n’existe ni solution miracle ni invincibilité, seulement un enseignement sérieux et un entraînement régulier.
eric@pariset.net www.jujitsuericpariset.com
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Ce qu’a réalisé Teddy Riner le week-end dernier est tout simplement exceptionnel. Je suis loin d’être pour le « tout compétition » et pour les excès qui y sont parfois attachés, notamment lorsque certains sportifs sont encensés au point de ne plus leur faire toucher terre. Mais là, avec Teddy Riner il faut se réjouir d’être en présence, non seulement d’un champion d’exception, mais aussi et surtout d’une personne au comportement exemplaire, ce qui n’est pas forcément le cas d’autres sportifs au palmarès moins éloquent. Cet homme rassemble des qualités techniques, physiques et mentales. En fait, il personnifie le fameux « Shin-ghi-taï » (l’esprit, la technique et le corps) cher à Jigoro Kano. Avec Teddy Riner, le sportif de haut-niveau retrouve une de ses fonctions : l’exemplarité ! Peut-être la plus importante aux yeux d’un éducateur.
L’allongement des congés scolaires est une bonne chose pour les enseignants et les élèves, ça l’est aussi pour le secteur du tourisme…C’est moins vrai pour la réalisation de progrès dans la pratique des arts martiaux. Rares sont les dojos ouverts durant ces périodes de vacances et à raison d’une fréquentation d’une fois ou deux par semaine sur huit mois, la régularité – une des sources de progression – s’en trouve indiscutablement impactée.
Ce week-end, en Hollande, on fêtait les quarante ans de l’International Martial Art Fédération (l’IMAF) dans sa « Branche Europe ». Cette organisation regroupe des arts martiaux traditionnels, elle permet de véhiculer et surtout de conserver un état d’esprit et une conception des arts martiaux qui est à l’opposé du « tout compétition ».
A l’occasion des premières vacances scolaires de la saison, certains dojos s’offrent une première pose. C’est sans aucun doute un moment propice pour un peu de lecture et de réflexion. Découvrir, ou redécouvrir une belle leçon de patience grâce à un extrait de l’excellent ouvrage « Contes et récits des arts martiaux de Chine et du Japon », participera à l’étude de nos chers arts martiaux. Bonne lecture.
Certes, il n’y avait pas énormément de ju-jitsukas sur les tatamis du magnifique dojo du club de Saint-Palais-sur-Mer en Charente-Maritime à l’occasion du stage que j’ai eu le plaisir de diriger dimanche dernier. Cela n’a rien de bien extraordinaire dans la mesure où il s’agissait d’une « première ». De plus, il est vrai que perdurent certains « blocages » ainsi qu’un sectarisme d’un autre âge. Et puis, existe la crainte de quelques réprimandes venant « d’en haut » en faisant la promotion d’un stage dirigé par une personne n’appartenant pas au « sérail » (et qui d’ailleurs n’appartient à aucun sérail, si ce n’est à celui des enseignants et défenseurs du ju-jitsu). Dommage, surtout lorsque ce sont les pratiquants que l’on prive d’un partage des connaissances.
Curieuse coïncidence : mercredi matin je mettais en ligne un billet sur mon blog dans lequel j’évoquais la déprofessionnalisation et la dévalorisation du métier (qui à mes yeux n’en n’est plus un) de professeur de judo (et accessoirement de ju-jitsu), le lendemain dans le journal Le Parisien, paraissait un article qui annonçait une grève – pas banale – des athlètes de l’équipe de France de judo : « bientôt la grève dans le judo français».
Bien que spécialisé dans le ju-jitsu, je pratique, j’aime et je me passionne aussi infiniment pour le judo. Comment pourrait-il en être autrement avec l’hérédité qui est la mienne ? Et puis, un lien indéfectible existe entre le ju-jitsu que j’enseigne et le judo. Là aussi, comment pourrait-il en être autrement, d’un point de vue historique ?
Une fois l’inscription concrétisée dans un dojo, les principales bonnes résolutions seront la régularité et la persévérance.