Nous arrivons à la lettre J de mon dictionnaire : J comme Ju-Jitsu et Judo, mais tout simplement comme Ju, « la souplesse ».
Il s’agit là de souplesse comportementale, d’un état d’esprit, bien plus que de souplesse physique ; qualité que l’on ne reniera pas, bien au contraire. C’est cette souplesse comportementale qui donne son originalité et sa valeur ajoutée à nos deux arts martiaux, aussi bien en matière d’efficacité dans d’éventuels affrontements qu’en matière d’éduction, à la condition que ces disciplines soient enseignées dans l’esprit qui était celui du fondateur.
De la « technique (ou l’art) de la souplesse » que représentait le ju-jitsu, Jigoro Kano a voulu élargir le champ d’action de l’art martial avec le judo « voie de la souplesse » (jitsu = technique, art ; do = voie). Il souhaitait ainsi démontrer que cette « souplesse » était aussi bien un principe à adopter en opposition lors d’un affrontement physique, que dans le cadre des relations sociétales, professionnelles, familiales ; bref il souhaitait un quotidien rendu harmonieux grâce à l’application de ce précepte. Il ne s’agissait plus d’un simple principe de combat, mais aussi d’une règle de vie.
Ne pas s’opposer à la force brutale en pliant, évitant ainsi de rompre, comme dans « Le chêne et le roseau » est un principe intelligent, mais faire en sorte que cette force, cette puissance de l’adversaire se retourne contre lui, l’est encore davantage ; cela ne relève pas du miracle mais d’une technique, et même d’une technologie de pointe. L’appliquer dans les relations humaines est parfois plus difficile, et pourtant n’est-ce pas essentiel de faire en sorte d’anticiper pour « gérer » au mieux d’éventuels désaccords de façon à éviter les conséquences toujours désastreuses d’un conflit ? C’est en cela que cette souplesse d’esprit est d’une inestimable valeur.
Cette souplesse comportementale ne doit pas être considérée comme un signe de faiblesse, bien au contraire ; n’y a-t-il pas plus belle victoire que celle remportée sans combattre, sans blessure physique ni mentale ?
Jigoro Kano n’hésitait pas non plus à évoquer l’utilité de ce principe dans le cadre professionnel, une sorte de « gagnant/gagnant ». N’y a-t-il pas meilleur accord que celui qui satisfait les deux parties ? Lorsque le plus fort écrase le plus faible, dans la rue, dans les conflits familiaux, dans le monde du travail : est-ce vraiment une heureuse issue ?
L’acquisition de cette souplesse comportementale ne peut se faire que par l’éducation, la transmission. Cela nous ramène une fois de plus au rôle capital de l’enseignant. Dans les arts martiaux, celui-ci ne doit pas se limiter à être un distributeur de techniques, ni (quant il s’agit de l’aspect sportif) à celui d’un « brailleur » le week-end sur les bords d’un tatami de compétition. Le professeur remplira son rôle par l’apprentissage des techniques de combat, auxquelles seront attachées les valeurs morales inculquées de la façon la plus naturelle possible, en premier lieu par l’exemplarité.
Cette souplesse, ce « Ju » qui différencie l’art martial de la simple activité physique, n’est-il pas aussi et même tout simplement « une forme de philosophie » ? Cette philosophie qui doit permettre de conduire son existence avec sagesse, pour la quête du bien-être… du bonheur, tout simplement.
eric@pariset.net www.jujitsuericpariset.com
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Retour au dictionnaire et à un article plus technique, avec la lettre I comme Ippon Seoi Nage.
Reprise du « dictionnaire » (et rediffusion) avec la lettre H. H comme Honneur.
Une petite pause dans la présentation du dictionnaire avec une courte histoire extraite, une fois de plus, du recueil « Contes et récits des arts martiaux de Chine et du Japon ». L’art de vaincre sans combattre. L’intelligence au service de la victoire.   :
« Voici le deuxième volet concernant la lettre D de mon dictionnaire des arts martiaux. J’ai choisi le mot       «dojo ». Comment pouvait-il en être différemment, dans la mesure où il s’agit de lieux où j’ai du passer le plus de temps ? Dans cette série d’articles consacrés à cette quatrième lettre de l’alphabet,  j’évoque ceux qui, par leur histoire et la puissance émotionnelle qu’ils ont exercé sur moi, ont marqué pour toujours ma mémoire.
Pour se distraire un petit peu – et réfléchir un peu aussi – dans cette période difficile,  je propose une histoire extraite du livre  » Contes et récits des arts martiaux de Chine et du Japon ».
Jeudi 19 mars
Dans ces jours particuliers durant lesquels nous vivons une situation qui l’est tout autant, j’ai pensé tenir un petit carnet à l’aide d’articles dans lesquels je ferai par de mes ressentis. Ces articles sont aussi disponibles sur Facebook, sur ma page personnelle (Eric Pariset) ou sur celle du club (Club Jujitsu Eric Pariset), ou encore sur les deux.
Kawaishi fait partie des personnages qui, dans leur domaine, marquent leur époque en laissant d’impérissables souvenirs.  Si dans notre pays, judokas et ju-jitsukas, en nombres considérables  assouvissent  leur passion, c’est un peu grâce à ce personnage haut en couleur.