On ne combat pas le feu avec le feu, ni la violence par la violence. Au risque de me répéter, je ne me lasserais jamais de militer pour un enseignement éducatif dans lequel l’apprentissage des techniques de défense sera essentiellement axé sur la maitrise de l’agresseur et non pas sur son extermination. Si abjecte que soit l’agression et nous n’en sommes pas privés, la répression, tout comme le maintien de l’ordre (en dehors du dojo) n’est pas la mission d’un éducateur, mais celle des services spécialisés dans ce domaine. Que l’on ne s’y méprenne pas, je ne suis pas habité par un idéalisme béat ni par un angélisme inapproprié, mais par une responsabilité professionnelle. Il n’est pas question non plus de « mollesse », ni dans le comportement, ni dans l’entraînement, ni dans une réaction indispensable en cas d’agression et d’une sanction à la hauteur du délit par la justice. Mais il existe une différence entre apprendre à se défendre et apprendre à détruire. La personne qui souhaite légitimement pouvoir se sortir d’une mauvaise situation ou aider quelqu’un à le faire, n’a pas forcément l’envie (et le droit, la notion de légitime défense ne devant pas être ignorée) de se transformer en « exterminator ».
Une mauvaise formation (ou l’absence de formation) est peut-être la raison d’un enseignement inadapté. Laisser des personnes sans qualification enseigner des techniques pouvant être fatales entraîne forcément certaines dérives. Un coup porté sans contrôle, une projection réalisée sur une personne ne sachant pas chuter, sans parler des étranglements, et bien toutes ces techniques ne peuvent pas être enseignées à la légère ; elles doivent être considérées comme de véritables armes. Or, pour pouvoir en détenir certaines, une autorisation est obligatoire. La mise en garde sur cette dangerosité doit accompagner l’enseignement.
Certes, miser sur l’éradication de ce fléau qu’est la violence par l’éducation est un travail de fond, un investissement à long terme, nous ne l’ignorons pas. Cependant il faut bien commencer un jour. Ce n’est certainement pas un enseignement dans lequel suinte la violence à l’encontre de la mission qui est celle de l’éducateur qui réglera ce problème. Apprendre à se défendre a toujours été utile, mais apprendre à être violent, sûrement pas ! Et puis, tout simplement, un pratiquant d’arts martiaux du XXIème siècle n’est pas un soldat.
Les arts martiaux ne se limitent pas à l’apprentissage de techniques de défenses, mais aussi à celui de principes d’éducation pour une vie meilleure en société ; c’est la grandeur des budo.
Pour conclure sur le sujet des violences, comment ne pas évoquer et s’interroger à propos de celles auxquelles on assiste dans des sports qui ont pourtant, à l’origine, la vocation de n’être que des jeux, surtout lorsque l’on constate – comme récemment – des accidents d’une extrême gravité pour les joueurs, ou encore le comportement absolument surréaliste d’un arbitre.
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Afficher en bonne place le Code moral sur un mur du dojo mais ne pas l’appliquer ne sert à rien. A moins que ce soit pour se donner bonne conscience ou encore revendiquer des principes sans les mettre en pratique. Heureusement, ces comportements ne sont pas (encore) majoritaires.
Parmi les évènements de cette nouvelle année, dans quelques semaines, fin mars précisément, se tiendra la 33ème édition du Festival des arts martiaux. Comme tous les ans depuis 1985, ce grand rendez-vous se tiendra à Bercy. Oui, j’ai encore des difficultés avec le nouveau nom : Accord Hôtel Aréna . Nous devrons nous y faire, puisqu’avec les J.O. une certaine pollution publicitaire devrait nous être imposée dans la capitale. Mais ce n’est pas le sujet du jour.
Dimanche soir, dans le TGV qui me ramenait de Paris à Niort, s’est manifestée l’envie d’évoquer les rendez-vous dominicaux, à l’image de celui que je venais de vivre. Une fois par mois, pour trois heures de ju-jitsu, je reviens dans la capitale pour y retrouver des personnes que j’apprécie infiniment. Au fil de la journée le plaisir se manifeste de plusieurs manières.
A chaque début de saison ce sont malheureusement plus de 50 % d’élèves qui ne renouvellent pas leur adhésion et ne reprennent plus le chemin du dojo. Ce chiffre émane de sondages effectués il y a quelques années mais il y a peu de chance qu’il ait évolué favorablement. Cela signifie que pour conserver le même effectif et « a fortiori » l’augmenter, il faut recruter la saison suivante un nombre équivalent de débutants, sinon plus. Il s’agit d’un challenge colossal et si ce n’était pas le cas, l’équilibre de la structure serait menacé.
Dernièrement un internaute se demandait si les professeurs de ju-jitsu testaient leurs techniques « en situation », c’est-à-dire dans la rue, pour être tout à fait précis. Cette question pourrait être posée plus largement à tous ceux qui enseignent une méthode de défense. Mais peut-être y avait-il un peu de malice dans cette interrogation ? Ceci étant, tester chaque technique dans la rue avant de l’enseigner n’est pas vraiment possible. D’abord parce que c’est interdit ; il existerait un problème de droit (et de conscience) s’il s’agissait de provoquer une telle situation.
Ce qu’a réalisé Teddy Riner le week-end dernier est tout simplement exceptionnel. Je suis loin d’être pour le « tout compétition » et pour les excès qui y sont parfois attachés, notamment lorsque certains sportifs sont encensés au point de ne plus leur faire toucher terre. Mais là, avec Teddy Riner il faut se réjouir d’être en présence, non seulement d’un champion d’exception, mais aussi et surtout d’une personne au comportement exemplaire, ce qui n’est pas forcément le cas d’autres sportifs au palmarès moins éloquent. Cet homme rassemble des qualités techniques, physiques et mentales. En fait, il personnifie le fameux « Shin-ghi-taï » (l’esprit, la technique et le corps) cher à Jigoro Kano. Avec Teddy Riner, le sportif de haut-niveau retrouve une de ses fonctions : l’exemplarité ! Peut-être la plus importante aux yeux d’un éducateur.