Atémi-waza

unnamedLa rentrée est là et avec elle le probable retour sur les tatamis pour (presque) tout le monde ; c’est l’occasion de revenir sur quelques aspects techniques de notre discipline. Aujourd’hui, j’ai choisi l’atémi-waza (le travail des coups).

Cet été, certains ont pu tester une approche, disons différente de notre discipline (c’était aux dojos de l’été, pour ne pas les nommer). Certains comptes rendus m’ont inspiré le sujet de ce billet.

Le travail des coups représente une composante importante de notre discipline, mais ce n’est pas la seule. Surtout, elle ne représente pas une finalité et son étude doit être faite selon certains critères.

Ci-dessous, le développement de ces trois points.

Premier point, le ju-jitsu est composé de trois grandes familles de techniques : le travail des coups (l’atémi-waza), le travail des projections (nage-waza) et le travail des contrôles (katame-waza). Chaque pratiquant possède ses préférences ainsi qu’un domaine dans lequel il se sent davantage à son aise. Question d’affinités, mais aussi et surtout d’aptitudes personnelles. Il n’empêche qu’aucune de ces trois composantes ne doit être négligée.

Deuxième point, dans notre art et à l’inverse de certaines disciplines, les coups ne doivent pas être considérés comme une finalité mais un moyen d’y parvenir. Exemple d’un enchaînement type : coups pour déséquilibrer, projection pour amener au sol et contrôle pour finaliser. Ce n’est pas systématique, mais cela répond à une logique de distance et pourrait d’ailleurs faire état d’une forme de chartre, de méthodologie fixant notre discipline.

Enfin, troisième point et pas le moindre, l’étude des coups se fera sans perdre de vue qu’ils doivent être compatibles avec les autres composantes. Par exemple, la garde (la posture) doit donner la possibilité de porter un coup, enchaîné avec une projection. Par conséquent, pour une bonne fluidité dans les liaisons, synonyme de rapidité, donc d’efficacité, la garde doit être compatible avec les différentes composantes : une garde trop basse (sur les jambes) limitera forcément la réalisation de certaines projections.

Voilà une mise au point qui a comme simple but de rappeler que notre discipline possède une identité et une histoire colossale, il serait invraisemblable de ne pas les respecter. Cela n’enlève rien à l’utilité et à l’efficacité d’autres arts martiaux et à l’intérêt qu’ils suscitent auprès de leurs fidèles, mais lorsque l’on pratique un art comme le ju-jitsu, il n’est pas question de le transformer, au risque de lui faire perdre aussi son âme ! Evoluer, oui, transformer au risque de dénaturer, non !

Enfin et ce sera le tout dernier point, il faut prendre en compte qu’une utilisation excessive des coups et notamment dans certaines situation comporte un risque en terme d’image pour ces techniques.

Un trésor…

Nous sommes encore en été et cette saison empreinte de douceur, et pour certains de temps libre, est propice à la réflexion ainsi qu’à la rêverie. Aussi, une fois de plus, j’avais envie de vous faire partager une histoire extraite du livre de Catherine Rambert : Petite Philosophie du soir.

Il sera temps dès la semaine prochaine de traiter, sur ce blog, des sujets, disons plus techniques. Bonne lecture.

Le trésor caché.

Il y a plusieurs siècles de cela, un homme très riche et très puissant croisa la route d’un pauvre hère qui allait à pied, sous le chaud soleil d’été. Malgré son apparent dénuement, il semblait serein et gai. Il ne possédait qu’une paire de chaussures et une canne, qui l’aidaient à progresser sur les chemins difficiles, sans autre protections contre les rayons de Phébus que sa bonne humeur.

Son visage respirait le bonheur.

L’homme riche, en revanche, se déplaçait dans un bel attelage, porté par de fiers destriers blancs. Ses serviteurs brandissaient au-dessus du carrosse un immense parasol et de grands éventails aux couleurs chatoyantes. Tous ceux qui composaient la suite du seigneur étaient vêtus des livrées les plus belles, ornées de broderies d’or. Mais lui, tapi dans l’ombre au fond de ses coussins, présentait sans cesse une face tourmentée, soucieux qu’il était de développer à chaque instant sa fortune déjà immense.

Néanmoins, sa quête personnelle d’argent ne l’avait pas rendu indifférent aux douleurs des autres.

Apercevant le pauvre, marchand non loin de là, il fit arrêter son attelage :

— Holà, où vas-tu comme ça, brave homme ? Tu sembles bien démuni. Veux-tu faire partie de mes serviteurs ? Ainsi, tu ne seras plus dans la misère. Chacun d’entre eux est payé cent sous.

— Mille mercis de votre générosité, monseigneur, répondit l’humble marcheur avec douceur. Je préfère garder ma liberté. Elle me permet d’aller et venir à mon gré et où bon me semble. De plus, en vérité, j’ai entrepris un long voyage, à la recherche d’un trésor.

— Un trésor ? Tu m’intéresses, reprit le richissime personnage, toujours avide de plus de biens. Comment ça un trésor ?

            — Oui, messire, un beau et merveilleux trésor. Celui qui le découvre devient aussitôt le plus riche et le plus heureux des hommes. Aucune fortune au monde ne peut égaler ce que je cherche.

— Mais dis-moi où il est, je t’aiderai à le trouver, et nous le partagerons. Voilà un marché qui me paraît équitable. Qu’en penses-tu ?

— Vous avez raison. Mon trésor demande bien des efforts. Il est très loin, là-bas, après les steppes et les montagnes, au-delà du désert et des mers. Nous ne serons pas trop de deux pour le découvrir. Je veux bien que vous veniez avec moi. Mais il vous faut laisser là votre équipage et vos gens, car ce trésor a un secret : il se révèle à ceux qui se sont donné la peine de le chercher, sans artifice de puissance ou de gloire.

— Qu’à cela ne tienne, je pars avec toi, répondit aussitôt le nanti, abandonnant sur-le-champ sa suite et ses chevaux oubliant son confort et ses protections du soleil.

Aussitôt les deux hommes se mirent en route. Ils marchèrent des jours et des lunes. Ils traversèrent les déserts du Sud, où ils virent de somptueux paysages et de magnifiques soleils couchants, descendirent des rivières dans lesquelles ils péchèrent des poissons aux saveurs exquises, ils gravirent des montagnes et ils virent pour la première fois la neige, découvrirent les steppes du Nord et leurs splendides pur-sang sauvages. Ils progressèrent ainsi durant de longues saisons, affrontant ensemble mille périls. Lorsque le riche marchand se blessa au pied, le sage le porta sur ses épaules, et ainsi durant plusieurs jours. Lorsque celui-ci fut à son tour affaibli par le froid, le seigneur lui offrit ses riches vêtements afin de le protéger.

Ainsi s’écoulèrent les mois. Chemin faisant, les deux hommes apprirent à se connaître. De grandes discussions les animaient, et parfois les faisaient rire aussi. Ils dormaient tantôt à la belle étoile, tantôt dans des abris de fortune, se nourrissaient frugalement et partageaient le vin lorsque, par bonheur, ils en trouvaient. Le marchand ne demandait jamais où était le trésor, tant il redoutait d’être incongru. Un jour, cependant, alors qu’une année s’était écoulée depuis leur départ, il interrogea son compagnon de route.

— Voilà des mois que nous progressons, lui dit-il. Nous avons affronté mille dangers. Nous avons traversé les déserts, les mers et les plaines, et je ne vois toujours pas de trésor. Ne t’es-tu pas trompé, mon ami ?

— Pas du tout. J’ai trouvé le plus grand, le plus beau et le plus merveilleux de tous les trésors.

—  Comment ça ? s’étonna l’autre, soudain furieux de ne s’être aperçu de rien. Tu l’as trouvé et ne m’as rien dit, félon ? Traître ! Nous devions pourtant le partager ! Mais où est-il donc ?

— Là, à côté de moi, depuis des semaines et des mois, répondit le sage. Me voilà riche de ton amitié, et toi de la mienne. N’est-ce pas là la plus grande des fortunes ?

Son compagnon accueillit ces propos sans un mot.

Puis, les larmes aux yeux, comprenant le message, il se leva et sera son ami dans ses bras.

Au bout de quelques minutes, il ajouta :

— Je crois que nous devons reprendre notre route, maintenant.

Et ensemble, les deux hommes poursuivirent leur chemin.

 

Un sourire dans l’été

Je ne résiste pas à l’envie de vous proposer un autre extrait du fameux livre Contes et récits des arts martiaux de Chine et du Japon. Réfléchir sous le soleil (ou pas) n’est pas trop fatiguant et surtout utile.

Infaillible concentration

Sen no Rikyu demeure dans la mémoire des Japonais le plus illustre Maître de Cha no yu, le rituel du thé. Il était au service de Hideyoshi, le kampaku qui gouvernait le pays à l’époque.

Un jour, alors que le Maître Rikyu officiait au cours d’une cérémonie du thé, Hideyoshi fit remarquer à ses généraux : « Regardez bien Rikyu préparer le thé et vous constaterez que son corps est rempli de Ki, que ses gestes précis et mesurés sont comme ceux d’un grand guerrier, ils n’offrent aucune ouverture. Sa concentration est sans faille. »

Une idée traversa Kato Kiyomasa, fameux général : pour vérifier si ce que disait le kampaku était aussi exact qu’il voulait le faire croire, il décida de toucher l’officiant avec son éventail dès qu’une ouverture se présenterait. Pris au jeu, il se mit à observer attentivement Sen no Rikyu qui se trouvait juste à côté de lui. Au bout de quelques minutes, croyant percevoir une faille, le général allait pointer son éventail.  

A cet instant précis, le Maître de thé le regarda droit dans les yeux, en lui souriant.

Kiyomasa en eut le souffle coupé. Son éventail lui en tomba des mains.

 

Tout commentaire semble superflu !

Bonne fin d’été.

 

Stages d’été

Nous sommes au cœur de l’été et c’est à cette période que des années durant j’ai eu le plaisir d’animer des stages. Ces rassemblements permettaient d’associer plaisir, perfectionnement et vacances. Cela n’a échappé à personne que la dernière édition du célèbre stage qui se déroulait en Gironde à Soulac-sur-Mer remonte à 2010.

Il y a un lien direct avec cette « coupure » et les nombreux soucis issus du dojo parisien. Il était difficile d’être sur plusieurs fronts à la fois.

Maintenant que j’ai pu opter pour un autre rythme, il n’est absolument pas exclu que pour l’été prochain (2016), l’aventure recommence.

Il y a eu vingt-cinq années de stages à Soulac, mais il y a eu aussi, au tout début, Beauvallon-sur-Mer au célèbre Golfe bleu dans le magnifique département du Var. Puis Le Temple-sur-Lot en pleine campagne, au milieu des fruitiers et sur les bords de la rivière apaisante. Ensuite et surtout ce fut Soulac et cette adorable station balnéaire qui nous a offert la pureté de son magnifique océan et l’euphorie que cette immensité ne manque pas de procurer à tous ceux qui sont réceptifs aux beautés que nous offre la nature. Je n’oublie pas une semaine, en juillet 2009, durant laquelle nous sommes retournés sur les côtes varoises, plus exactement à Ramatuelle sur la presqu’île de Saint-Tropez. Tous ces stages ont laissé de beaux souvenirs à ceux qui ont eu la chance d’y participer. Quelle que soit la destination, nul doute que beaucoup seront heureux de renouer avec ces grands rassemblements.

Pour ce qui est de cette année, il est sûrement encore temps de s’inscrire au stage que l’EAJJ propose à Villefort dans le Lot, du 16 au 22 août, et qui sera dirigé par Christian Rassouw. Pour cela, rendez-vous sur le site de l’association : www.atemi-jujitsu.org

Bonne continuation à toutes et à tous.